Parfois il m'est utile de le dire !

                                                                                                          Oh! Colombe, transmets mon salut d...

700 jours de Guerre et Netanyahou ne sera jamais un Héros

 

Une tribune moins important nous dit des prouesses de Tsahal et du Mossad, au demeurant impressionnantes  que par le énième rappel nous fait de la puissance de la propagande. Pourtant comme toujours les alliés d’Israël s’épuisent par des contre-récits qui ne convainquent guère au-delà du cercle sioniste. Mais en assimilant systématiquement le Hamas au nazisme et en généralisant ses accusations, le texte de cette tribune illustre lui-même ce qu’il prétend combattre : une bataille de récits où la nuance disparaît et où la complexité est sacrifiée au profit d’une rhétorique binaire.

Dans une récente tribune à tendance sioniste célèbre les « prouesses » du Mossad et de Tsahal dans l’élimination de figures stratégiques du Hamas, du Hezbollah ou des Houthis. Mais au-delà de cette énumération de succès militaires, le texte cherche surtout à dénoncer la puissance de la propagande adverse, accusée d’avoir transformé le Hamas en symbole de résistance et d’avoir relégué les victoires israéliennes au second plan.

Pourtant, ce texte dit finalement peu de chose de nouveau sur les prouesses israéliennes. Son véritable apport est ailleurs : il illustre, à son insu, la manière dont le débat sur la propagande du Hamas se mue lui-même en un exercice de propagande inversée.

Le constat est juste : Israël gagne ses batailles tactiques, mais perd la guerre des récits. La résistance du Mouvement Hamas, sans disposer d’armées régulières comparables, s’impose dans l’opinion mondiale grâce à une narration fondée sur l’injustice et la souffrance. Mais c’est justement sur ce terrain que la tribune se révèle contre-productive.

Car pour démontrer la nocivité de la propagande palestinienne, l’auteur en adopte lui-même les armes : analogies extrêmes avec le nazisme, figure de Goebbels convoquée pour qualifier Abou Obeida, dénonciation globale de l’ONU, de l’UNRWA ou encore des journalistes gazaouis assimilés à des « complices ». Cette rhétorique, binaire et saturée d’accusations, ne convainc pas au-delà du cercle acquis. Elle enferme le débat dans une opposition manichéenne : Israël serait synonyme de vérité et d’efficacité, La résistance du Mouvement Hamas, et ses soutiens n’incarneraient que haine et mensonge.

Or c’est précisément cette absence de nuance qui alimente la défiance. Réfuter les accusations de « génocide » ou « d’apartheid » en les qualifiant simplement de « mots mensonge » ne suffit pas. Il faudrait s’interroger sur les raisons profondes pour lesquelles ces termes trouvent une telle résonance dans l’opinion internationale : images d’enfants blessés, quartiers détruits, blocage de l’aide humanitaire. Les ignorer ou les balayer d’un revers de main renforce le soupçon de déni.

La guerre des récits ne se gagne pas par une contre-propagande encore plus martiale. Elle suppose de reconnaître la complexité, d’admettre les zones grises, et de parler un langage crédible, au lieu de se réfugier dans un discours défensif et moralisateur. La supériorité militaire d’Israël ne fait aucun doute. Mais sa parole reste enfermée dans un registre technocratique et accusatoire, incapable de rivaliser avec la charge émotionnelle de la narration adverse.

En dénonçant la propagande de la résistance du Mouvement Hamas, tout en y répondant par une autre propagande, cette tribune illustre un piège récurrent : transformer un constat lucide en discours aveugle. Si Israël et ses alliés veulent un jour inverser la tendance, ils devront comprendre que convaincre ne consiste pas seulement à vaincre. La guerre de l’opinion exige autre chose qu’une liste de frappes réussies ou de mensonges dénoncés : elle exige un récit humain, complexe, capable d’émouvoir sans manipuler, et de convaincre sans écraser.

Lorsque l’article affirme que « les enfants palestiniens ont été élevés dans la haine », il ne décrit pas une réalité, il construit une image totale et immuable de l’ennemi. Tout est amalgamé : La résistance du Mouvement Hamas, Autorité Palestinienne, UNRWA, familles, enseignants. L’école palestinienne ne serait plus qu’un laboratoire de haine, l’UNRWA complice criminelle, les parents simples relais d’un endoctrinement religieux impitoyable. Mais cette présentation caricaturale sert moins à informer qu’à délégitimer.

Oui, l’instrumentalisation des enfants dans les conflits est une tragédie, et personne ne peut nier que certains manuels scolaires palestiniens ou certains discours officiels entretiennent un imaginaire de confrontation. Mais réduire toute une génération à une « haine incrustée » revient à nier leur humanité, à ignorer les témoignages d’enseignants, d’associations, de familles qui aspirent à autre chose qu’à la guerre.

Là encore, la dénonciation de la propagande adverse se transforme en propagande miroir : on essentialise, on généralise, on enferme. Ce procédé empêche toute réflexion sérieuse sur la manière dont la violence, l’occupation, la misère ou le désespoir façonnent les représentations. La haine n’est pas une essence héréditaire, elle est le fruit d’un contexte politique et social qui, lui, peut changer. Mais pour le reconnaître, encore faut-il sortir du confort du récit binaire.

« L’éducation dans la haine » : un récit trop commode

L’article affirme que les enfants palestiniens sont « élevés dans la haine » par leurs familles, leurs écoles, l’Autorité Palestinienne, La résistance du Mouvement Hamas et même l’UNRWA. Cette généralisation radicale n’analyse pas une réalité : elle fabrique une image essentialisée de l’adversaire.

Certes, il est incontestable que des manuels, des prêches et certains discours officiels entretiennent une vision antagoniste et véhiculent des stéréotypes dangereux. Mais réduire toute une société à une « haine incrustée » revient à nier la diversité des trajectoires, à effacer les initiatives éducatives alternatives et les voix palestiniennes qui aspirent à autre chose qu’à l’affrontement permanent.

Qualifier l’UNRWA de « complice criminelle » relève davantage du procès idéologique que de l’enquête rigoureuse : aucune organisation internationale ne résiste à la tentation de la critique, mais balayer son rôle en bloc occulte aussi son action quotidienne auprès de millions de réfugiés.

Ce type de discours ne combat pas la propagande, il la mime : il essentialise, généralise, délégitime. En enfermant les enfants palestiniens dans une identité de « haine », il rend impossible toute perspective de réconciliation future. Or la haine n’est pas un gène transmis à la naissance, c’est un produit de contextes politiques et sociaux — et c’est précisément parce qu’elle est produite qu’elle peut, à terme, être déconstruite.

Abou Obeida n’était pas seulement un porte-parole : il incarnait la stratégie médiatique du Hamas, celle qui transforme chaque événement en arme narrative. Sa mort, pour symbolique qu’elle soit, ne met pas fin à ce système. Car la véritable force du Hamas ne réside pas seulement dans ses combattants ou ses infrastructures souterraines, mais dans sa capacité à imposer un récit qui dépasse les frontières de Gaza.

Cette propagande fonctionne d’autant mieux qu’elle trouve un terrain fertile à l’international. Dans nos sociétés, où l’émotion collective précède souvent l’analyse, les images de destructions et de souffrances se substituent aux explications, et le Hamas sait les instrumentaliser. L’essentiel de la bataille, dès lors, ne se joue plus seulement au Proche-Orient : il se déroule aussi dans l’espace médiatique et politique occidental, où les récits circulent, se simplifient et façonnent l’opinion.

La résistance du Mouvement Hamas a su développer une stratégie de communication singulière : présenter ses actions armées comme des actes de résistance, tout en exploitant médiatiquement les conséquences des ripostes israéliennes. Là où d’autres mouvements révolutionnaires du XXe siècle misaient sur l’héroïsme ou la pureté idéologique, La résistance du Mouvement Hamas combine deux registres : la fierté interne d’avoir frappé l’ennemi et l’image externe d’un peuple écrasé qui réclame justice. Ce « double discours » lui permet de fédérer ses partisans tout en séduisant une opinion internationale sensible aux récits de victimisation.

Pourtant, ce texte dit finalement peu de chose de nouveau sur les prouesses israéliennes. Son véritable apport est ailleurs : il illustre, à son insu, la manière dont le débat sur la propagande La résistance du Mouvement Hamas se mue lui-même en un exercice de certitude inversée.

L’article  de la tribune en question reste juste une suite de périphrases intellectuelles visant encore une fois à transformer les assassins sionistes en victimes juives. Ils ne mentent pas, ils sont en quelque sorte le mensonge.                                                                                                                                           Qu’est-ce que ça va être quand les gens vont comprendre que leurs mensonges ne se limitent pas aux 40 bébés de décapités ?

Il faudrait tout de même qu’un jour, ils changent de disque car celui-ci est usé jusqu’à la trame, car il est aisément palpable que mise à part les Palestiniens, pour beaucoup de société monde autour du globe, la disparition d’Israël est devenue promesse de rachat. 

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

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Le Soldat d’Israël : Tu n’as jamais été un héros

 

Sous le vernis humanisant du témoignage individuel, une vérité glaçante se dévoile : les soldats israéliens, même lorsqu’ils se disent “simples”, participent à une mécanique de mort. L’histoire d’un soldat d’origine philippine à Gaza, illustre à quel point l’innocence revendiquée sert de paravent à l’injustice structurelle.

Le portrait du soldat israélien issu d’une famille migrante philippine, pourrait émouvoir. Ses dessins réalisés à Gaza, ses références bibliques à l’amour du prochain, sa fierté identitaire face aux discriminations, tout cela donne l’image d’un jeune homme sincère, attachant, presque exemplaire. Mais cette humanisation cache l’essentiel : ce soldat a servi dans une armée qui bombarde, détruit, déplace. Et ses propos, loin d’être neutres, reprennent mot pour mot le récit officiel israélien.

L’illusion du “simple soldat” : « Je ne suis pas un homme politique… quand on m’appelle, je viens. » Cette phrase résonne comme une confession d’innocence. Mais c’est précisément le problème. Obéir sans réfléchir, réduire sa responsabilité à l’exécution d’ordres, c’est ce qui rend possibles les pires crimes collectifs. Hannah Arendt parlait de « banalité du mal » : le mal ne réside pas seulement dans les idéologues, mais aussi dans les foules de fonctionnaires et de soldats qui acceptent de faire « simplement leur travail ».

Un discours verrouillé par la peur : Ce soldat n’est pas naïf. Il sait qu’en Israël, critiquer l’armée, c’est ruiner sa vie sociale, son avenir professionnel, sa sécurité. Alors il répète le catéchisme : nous protégeons les civils, c’est le Hamas qui est coupable, nous aidons à l’humanitaire. Mais chacun sait que Gaza est sous blocus, que des milliers de familles sont brisées, que des enfants meurent sous les bombes. Dire autre chose, pour lui, serait suicidaire. Mais se taire, c’est déjà collaborer.

L’héroïsme confisqué : Le véritable enjeu n’est pas de savoir si ce soldat est “gentil” ou “méchant”. L’argument selon lequel « tous les soldats ne sont pas mauvais » est une diversion. Car le problème n’est pas l’innocence individuelle mais la machine collective : une armée qui obéit à une idéologie de domination, une société qui glorifie la violence, un État qui punit la dissidence. Le parallèle avec l’Allemagne nazie, cité dans le texte, n’est pas qu’une provocation : il rappelle que ce sont les systèmes qui écrasent, et que les individus qui “se contentent d’obéir” y sont complices.

Conclusion : Le soldat Israélien veut « une vie normale » : travailler, se marier, avoir des enfants. On peut comprendre ce désir. Mais derrière son récit apaisant, il y a les familles palestiniennes qui n’auront jamais cette chance. Ses dessins ne changeront rien à la brutalité qu’il a servie. « Tu n’as jamais été un héros », lui rappelle le texte. Et c’est vrai.

Les bombes ne font pas de héros. Elles fabriquent des complices.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

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Le grand mufti de Jérusalem n’a pas inventé la Shoah: quand l’histoire devient arme politique

 

En accusant Hadj Amin al-Husseini d’avoir inspiré Hitler dans la mise en œuvre de la “solution finale”, Benyamin Netanyahou ne se contente pas de déformer l’histoire. Il invente un dialogue imaginaire, détourne la mémoire de la Shoah et jette une accusation infondée sur les Palestiniens. Or la vérité historique est claire : la Shoah est une responsabilité exclusivement nazie, déjà en cours avant la rencontre d’Hitler et du mufti.

Quand l’histoire est réécrite pour servir la politique : À Jérusalem, devant le 37ᵉ Congrès sioniste mondial, Benyamin Nétanyahou a affirmé que le grand mufti de Jérusalem, Haj Amin al-Husseini, aurait convaincu Adolf Hitler de passer de l’expulsion à l’extermination des Juifs. Il a même prêté aux deux hommes un dialogue hallucinant : « Que dois-je faire d’eux ? », aurait demandé Hitler. « Brûlez-les », aurait répondu le mufti.

Or ce dialogue est une pure invention. Le compte-rendu officiel de la rencontre du 28 novembre 1941 existe : il a été publié, étudié, analysé. On y lit la volonté du mufti de bloquer toute émigration juive vers la Palestine et la promesse d’Hitler de ne tolérer aucun « foyer juif » après sa victoire. Mais à aucun moment, pas une ligne ne mentionne une telle scène. Ce passage est imaginaire, forgé pour servir une narration politique contemporaine.

En réactivant ce mythe, Benyamin Nétanyahou ne cherche pas tant à rétablir une vérité historique qu’à servir un objectif politique immédiat : délégitimer les Palestiniens d’aujourd’hui en les associant au crime absolu du XXᵉ siècle. C’est une manœuvre rhétorique, qui vise à figer l’adversaire dans la figure du bourreau nazi, à brouiller les lignes de responsabilité et à justifier la politique actuelle d’Israël en présentant le peuple palestinien comme héritier d’une haine génocidaire. Mais cette stratégie a un prix : celui d’affaiblir la mémoire de la Shoah elle-même

La Shoah avait déjà commencé : Les faits sont établis : en novembre 1941, le génocide est déjà en marche. Depuis l’été, les Einsatzgruppen fusillent méthodiquement les communautés juives en Ukraine, en Biélorussie et dans les pays baltes. À Kiev, le massacre de Babi Yar, en septembre 1941, coûte la vie à 33 771 personnes en deux jours. Ces crimes, commis avant la rencontre de Berlin, témoignent d’une dynamique exterminatrice déjà enclenchée.

Faire croire qu’Hitler aurait hésité jusqu’à ce qu’un dirigeant palestinien l’oriente vers la solution radicale est une falsification flagrante. La Shoah fut conçue et organisée au cœur du régime nazi : Hitler, Himmler, Heydrich, et l’ensemble de l’appareil d’État allemand en furent les acteurs. Ni le mufti ni aucun autre responsable extérieur ne peuvent en être les inspirateurs.

Le rôle réel du mufti : Il est nécessaire de replacer le mufti de Jérusalem Hadj Amin al-Husseini dans son contexte. Comme dirigeant politique palestinien, il a cherché à empêcher l’immigration massive de Juifs vers la Palestine, perçue alors comme une menace existentielle pour son peuple. Cela ne fait pas de lui un idéologue de l’extermination nazie. S’il a pu trouver un intérêt tactique à se rapprocher de l’Allemagne hitlérienne, ce rapprochement relève avant tout d’une logique anticoloniale et d’un refus du projet sioniste en Palestine, et non d’une contribution à la mise en place de la « solution finale ».

Confondre opposition à une immigration coloniale et responsabilité dans un génocide planifié en Europe est une accusation infondée, qui déforme la mémoire et brouille les responsabilités.

Le déplacement du Mufti à Berlin n’autorise en rien à le transformer en architecte ou en déclencheur de la « solution finale ». La complicité ne fait pas la paternité. Al-Husseini fut un allié opportuniste du Reich, pas l’idéologue ni le stratège de son projet exterminateur.

En réactivant ce mythe, Benyamin Nétanyahou ne cherche pas tant à rétablir une vérité historique qu’à servir un objectif politique immédiat : délégitimer les Palestiniens d’aujourd’hui en les associant au crime absolu du XXᵉ siècle. C’est une manœuvre rhétorique, qui vise à figer l’adversaire dans la figure du bourreau nazi, à brouiller les lignes de responsabilité et à justifier la politique actuelle d’Israël en présentant le peuple palestinien comme héritier d’une haine génocidaire. Mais cette stratégie a un prix : celui d’affaiblir la mémoire de la Shoah elle-même.

Une instrumentalisation dangereuse

Les accusations de Netanyahu : A par sa psychopathie avérée comme sa perversion et son narcissisme évident, tout est faux chez lui. Son incommensurable bêtise fait qu’il est devenu la risée de tous les peuples de la Terre que cette dernière soie sphérique ou plate. L’évidence est là !!!

Lui et ses légions damnées formées par les immondes et mafieux Sataniques et sionistes nazis par leur maîtres : les Etats Unis et l’Occident sont l’alpha et l’oméga du mal incarné, sont historiques fausses. Ce que fait Netanyahou, ce n’est pas de l’histoire et l’histoire bégaie : c’est de la rhétorique politique. En associant la cause palestinienne au crime absolu du XXᵉ siècle, il cherche à délégitimer un peuple entier et à faire passer la lutte nationale palestinienne pour une haine génocidaire. Mais ce faisant, il minimise la responsabilité des nazis et fragilise la mémoire de la Shoah.

L’antisémitisme séculaire des Palestiniens : En affirmant l'existence d'une tradition antisémite séculaire parmi les Palestiniens, culminant avec une participation active à l'anéantissement du peuple juif, Netanyahou entend établir une continuité historique directe et sans équivoque. Il insinue que l'Intifada actuelle n'a rien à voir avec l'occupation israélienne de la Cisjordanie, le mur de séparation, la question des colonies juives sur les terres palestiniennes ou la situation socio-économique générale des Palestiniens, mais qu'elle repose essentiellement sur un antisémitisme profondément ancré.

Les historiens de Yad Vashem, des chercheurs israéliens et même le gouvernement allemand ont rappelé en 2015 l’évidence : la responsabilité de la Shoah est entièrement nazie. L’affirmer, ce n’est pas protéger les Palestiniens ; c’est protéger la vérité historique et l’humanité tout entière contre les falsifications qui nourrissent la haine.

Protéger la mémoire de la Shoah : La Shoah n’a pas besoin de faux dialogues ni de boucs émissaires inventés. Elle a ses responsables : ils étaient allemands, nazis, et ils ont planifié la destruction de six millions de Juifs européens. La mémoire de ce crime exige rigueur, respect et vérité. La transformer en arme politique conjoncturelle, c’est trahir sa portée universelle et son rôle de garde-fou contre les idéologies de haine.

Il faut le dire sans ambiguïté : les Palestiniens, en tant que peuple, ne portent aucune responsabilité dans la Shoah. Au contraire, nombre d’entre eux se sont battus dans les rangs des Alliés contre le fascisme. Associer artificiellement leur histoire nationale à l’extermination des Juifs d’Europe, c’est une injustice profonde, une calomnie qui alimente la haine au lieu de construire des ponts de compréhension et de paix.

Aujourd’hui, plus que jamais, il importe de protéger la vérité historique. Le mufti de Jérusalem fut un personnage politique, il n’a pas soufflé à Hitler l’idée du génocide. Oui, la Shoah fut planifiée, mise en œuvre et assumée par le régime nazi, en Allemagne et en Europe occupée. Non, on ne saurait en faire une responsabilité palestinienne.

L’histoire est assez lourde de tragédies pour qu’on la respecte telle qu’elle fut. La Shoah doit rester un lieu de vérité, non de manipulation. Elle n’appelle pas à accuser de nouveaux coupables imaginaires, mais à renforcer une vigilance universelle : celle qui dit « plus jamais ça », sans mensonge et sans calcul.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

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Gaza, le Cœur Invincible de la Résistance

 


Je n’ai jamais vu, dans l’histoire contemporaine, une résilience comparable à celle du peuple de Gaza. Depuis vingt-deux mois d’une guerre implacable, sans répit ni rémission, ils continuent de tenir debout là où toute force humaine semblait devoir s’effondrer. Ni la puissance des armes, ni l’étouffement économique, ni les ruines accumulées n’ont pu briser leur volonté.

Le modèle ici est celui d’une guerre urbaine: Les combattants d'élite des Brigades Al-Qassam honorent leur unité de tunnel, embrassant leurs têtes en reconnaissance des hommes qui passent des années sous le sol de Gaza à creuser les artères de la résistance. Alors que l'armée sioniste se cache derrière des murs et des frappes aériennes, ces hommes travaillent dans l'obscurité, sous le siège et sous le feu, garantissant que lorsque la bataille éclate, les défenseurs de Gaza peuvent surgir de n'importe où. C’est le visage de l’engagement que l’occupation n’égalera jamais.

 Les combattants utilisent des embuscades à plusieurs niveaux : une première frappe pour immobiliser le véhicule de tête, scellant la colonne, puis des volées de précision de Yasin-105 ou de RPG sous plusieurs angles pour forcer les démontages. Les équipes anti-blindés se coordonnent avec les unités d'assaut rapproché, des hommes portant des charges de sacoche ou de ventre, pour achever les véhicules hors d'usage à une proximité mortelle, souvent quelques secondes après le coup initial. En cas de besoin, ils utilisent des engins de martyre aux moments décisifs, acceptant une détonation à bout portant pour garantir une mort certaine. Les voies d'évacuation sont pré-cartographiées à travers des bâtiments interconnectés et des tunnels, permettant un retrait rapide avant les tirs de riposte.

 Ils survivent, et plus encore : ils affirment leur présence face à ceux qui croyaient pouvoir les effacer. Leur résistance est une flamme que nulle tempête ne peut éteindre, une certitude que la terre qui les porte leur appartient et que nul mur, nul siège, nul bombardement ne saurait leur arracher.

Sous les décombres, dans l’obscurité des tunnels, des hommes creusent comme on trace des veines au cœur de la terre. Chaque passage est une artère de vie, chaque battement dans l’ombre une promesse de liberté. Là où d’autres se cachent derrière des murailles et des machines, eux avancent avec la seule force de leur foi et de leur engagement.

Leur lutte n’est pas seulement celle des armes, elle est celle de la dignité. Dans chaque maison éventrée, une famille persiste. Dans chaque enfant qui apprend malgré la faim et la peur, la mémoire se transmet. Dans chaque prière, dans chaque regard levé vers le ciel, Gaza proclame qu’elle ne sera jamais soumise.

À chaque assaut repoussé, à chaque incursion ralentie, le monde entier assiste à une vérité éclatante : la technologie la plus sophistiquée, les budgets les plus démesurés, les alliances les plus puissantes échouent devant la ténacité d’un peuple qui refuse de mourir. Gaza n’est pas seulement un champ de bataille : elle est devenue le miroir où l’arrogance des envahisseurs se brise.

Aujourd’hui, Gaza est le cimetière de la fierté de ceux qui pensaient la vaincre. Chaque pas qu’ils arrachent est payé d’un prix trop lourd, chaque avancée se transforme en défaite morale. Car ici, la résistance ne se mesure pas en kilomètres conquis, mais en siècles de dignité conservée.

Et dans l’obscurité, ils continuent de creuser. Avec foi, ils continuent de s’élever. Chaque tunnel est une prière gravée dans la terre, chaque combattant est un battement de cœur de la Palestine. Ils portent le courage, le sacrifice et l’engagement que l’occupation ne connaîtra jamais.

Gaza n’est pas seulement une ville assiégée : elle est une leçon pour le monde, un symbole éternel que la force véritable naît de l’injustice subie et du refus de plier.

22 mois sans répit, 22 mois debout : Depuis vingt-deux mois d’une guerre implacable, Gaza se tient droite.
Ce que l’on croyait être une reddition est devenue une affirmation de vie.
Celui d’une guerre urbaine interarmes délibérée et disciplinée, compressée à une micro-échelle. Les moudjahidines intègrent la reconnaissance, l’ingénierie, la lutte anti-blindée et l’assaut d’infanterie dans l’espace d’un seul pâté de maisons. Ils frappent lorsque l'occupant est le plus vulnérable, lors de la récupération d'un véhicule, de l'évacuation de l'équipage ou de l'intervention d'un ingénieur, transformant ainsi des opérations de routine en événements à fort taux de pertes. Chaque Merkava brûlé est une émission diffusée au monde : la technologie occidentale et les budgets de plusieurs milliards de dollars ne peuvent pas vaincre les combattants qui les surpassent, les surpassent et les combattent dans leurs propres zones de destruction. Gaza ne se contente pas de résister, elle démantèle chirurgicalement la puissance terrestre de l’occupation, une colonne paralysée à la fois.

Gaza est devenue le cimetière de leur fierté, et les moudjahidines s’assurent que chaque mètre que l’ennemi ose franchir sera payé en machines détruites, en moral brisé et en un héritage de défaite qui les hantera longtemps après la fin de la guerre
Ni les bombes, ni le blocus, ni les deuils accumulés n’ont brisé la dignité de ce peuple.

Les veines de la terre, les battements du cœur : Sous les ruines et dans l’obscurité, des mains creusent encore.
Chaque tunnel est plus qu’un passage : c’est une artère de résistance, une prière gravée dans la poussière.
Chaque combattant, chaque habitant est un battement de cœur de la Palestine.
Là où d’autres se retranchent derrière des murailles et des machines, Gaza avance avec foi et patience.

La dignité plus forte que les armes : La véritable lutte de Gaza n’est pas seulement militaire : elle est humaine et morale.
Dans chaque maison éventrée persiste une famille.
Dans chaque enfant qui apprend malgré la peur, la mémoire se transmet.
Dans chaque prière murmurée sous les bombes, Gaza proclame son refus de plier.

Le miroir de l’arrogance : Les technologies les plus avancées, les budgets les plus colossaux et les armées les plus lourdes échouent devant une vérité simple :
on ne peut vaincre un peuple enraciné dans sa terre et porté par la justice de sa cause.
Chaque incursion devient une défaite morale.
Chaque tentative de conquête révèle la fragilité de ceux qui croyaient tout dominer.

Gaza, flamme éternelle : Aujourd’hui, Gaza est plus qu’une ville assiégée : elle est devenue un symbole universel.
Un exemple pour les peuples opprimés.
Un rappel que la véritable force ne réside pas dans les chars ni les bombes, mais dans le courage, le sacrifice et la dignité.

Dans l’obscurité, ils creusent.
Avec foi, ils s’élèvent.
Et tant que Gaza respire, la Palestine battra au rythme de son cœur invincible.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
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Entre peste et choléra : droite/gauche,l’hypocrisie coloniale française face à l’Algérie

 

Introduction : La relation entre l’Algérie et la France reste l’un des points aveugles du débat politique français. À chaque alternance, certains Algériens espèrent que la gauche française représentera un partenaire plus sincère que la droite. Mais cette illusion, persistante depuis les années 1980, n’a cessé de se heurter aux faits : qu’elle soit habillée de promesses socialistes ou d’un discours républicain musclé, la politique française à l’égard de l’Algérie reste fondamentalement coloniale.

Comme l’a montré Benjamin Stora (1991), la mémoire de la guerre d’Algérie est refoulée en France, mais jamais dépassée. Ce refoulé produit une constante : une hostilité de fond, parfois brutale à droite, plus subtile à gauche, mais toujours présente. C’est cette hypocrisie structurelle que nous proposons d’analyser : une France qui ne comprend que la force, une gauche qui masque son poison derrière un peu de miel, et une diplomatie qui trahit la continuité coloniale jusque dans ses gestes symboliques.

La gauche française : le poison sous le miel : L’illusion d’une gauche française « amie » de l’Algérie a été démentie par l’histoire. François Mitterrand en est l’illustration parfaite : célébré à son arrivée au pouvoir en 1981 comme porteur d’un nouvel espoir, il n’était autre que l’ancien ministre de l’Intérieur responsable de la répression coloniale dans les années 1950. Comme le rappelle Todd Shepard (2006), la gauche au pouvoir en 1981 n’a nullement amorcé une rupture mémorielle ou politique avec l’héritage colonial.

Aujourd’hui, les postures de Jean-Luc Mélenchon ou de figures médiatisées comme Rima Hassan ne changent rien au fond : derrière un discours progressiste ou anticolonial de façade, l’Algérie reste perçue comme un objet de gestion diplomatique, non comme un partenaire égal. L’hypocrisie est constante : adoucir le ton pour mieux défendre les mêmes intérêts.

La droite et l’extrême droite, elles, n’ont pas ce souci : elles disent ouvertement leur hostilité. Mais sur le plan des politiques concrètes — migrations, commerce, diplomatie — la différence reste minime.

La France ne comprend que la force : Un constat s’impose : en 132 ans de colonisation comme depuis l’indépendance, Paris n’a jamais cédé par « gentillesse ». C’est la guerre de libération, menée par le FLN et payée au prix de centaines de milliers de morts, qui a contraint la France à partir. Comme l’écrit Mohammed Harbi (2004), « l’État colonial n’a jamais reconnu ses crimes de lui-même, il n’a reculé que devant l’échec militaire et la faillite politique ».

Aujourd’hui encore, l’Algérie ne se fait respecter que lorsqu’elle adopte une ligne dure : réduction de l’usage du français, diversification des partenariats vers la Chine, la Russie, ou la Turquie, et fermeté mémorielle. Ces gestes irritent Paris, mais c’est précisément parce qu’ils affirment la souveraineté algérienne qu’ils obligent la France à écouter.

L’histoire le rappelle : ce sont des soldats algériens qui ont libéré Marseille et la Provence en 1944, alors que l’armée française s’était effondrée en deux semaines en 1940. Dire aux Algériens « rentrez chez vous » relève donc de l’amnésie : les Algériens ne sont pas des intrus en France, ils en ont écrit une page essentielle. Ce rappel historique agit comme une arme polémique mais légitime : il déconstruit le récit d’une France « généreuse » qui aurait accueilli ses anciens colonisés, alors qu’elle leur doit sa propre survie.

Héritages coloniaux : du pillage au Sahara occidental : L’histoire coloniale n’est pas un passé clos. La France est venue en Algérie « sans visa », par la force des armes, en massacrant et pillant les ressources (Le Cour Grandmaison, 2005). Le mouvement migratoire algérien vers la France après 1962 n’a rien d’un « envahissement » : il est le prolongement direct de cette histoire coloniale, comme l’a montré Abdelmalek Sayad (1999). Les Algériens en France ne volent rien : ils travaillent, cotisent, et contribuent.

Les gestes diplomatiques récents confirment la persistance d’une logique coloniale.  Ces gestes nourrissent une conviction largement partagée en Algérie : la France n’a jamais digéré sa défaite de 1962 et continue de cultiver un imaginaire impérial. C’est pourquoi l’idée de réparations, de reconnaissance et même d’excuses publiques refont surface, non comme une provocation, mais comme une nécessité pour solder l’histoire.

Force, mémoire combattante et stratégies algériennes: L’histoire des relations franco-algériennes semble confirmer une constante : la France ne comprend et ne respecte que la force. Déjà, lors de la Révolution française, la logique de l’insurrection violente fut glorifiée comme unique voie vers l’émancipation. De la même manière, ce n’est pas la négociation mais bien la guerre de libération menée par le FLN qui a contraint Paris à quitter l’Algérie en 1962 (Shepard, 2008 ; Stora, 1991).

Ce constat structure encore aujourd’hui les choix stratégiques de l’État algérien. Face aux ambiguïtés françaises, Alger a multiplié les signaux de distanciation : réduction de l’usage du français dans l’enseignement et l’administration (Grandguillaume, 2004), ouverture diplomatique et économique vers la Chine, la Turquie, la Russie et l’Afrique subsaharienne. Loin d’être anecdotiques, ces décisions s’inscrivent dans une logique de souveraineté linguistique et géopolitique, interprétée comme la seule « langue » que Paris comprenne.

Cette dynamique résonne particulièrement avec la mémoire de la diaspora algérienne en France. Nombre de travailleurs algériens et maghrébins ont participé à la Résistance et à la Libération de la France en 1944, notamment dans les combats de Provence et de Marseille (Pervillé, 2002 ; House & MacMaster, 2006). Ces contributions, pourtant décisives, sont largement occultées par les récits nationaux français, qui préfèrent insister sur l’humiliation de la défaite de 1940 ou sur le rôle exclusif de la Résistance française. Ce refoulement mémoriel produit une contradiction criante : des Algériens ont versé leur sang pour libérer la France, alors que leurs descendants sont aujourd’hui sommés de « rentrer chez eux ».

Ainsi, la mémoire combattante des Algériens en France, conjuguée à la stratégie d’autonomisation d’Alger, dessine une leçon de réalisme politique : tant que Paris refusera de reconnaître pleinement cette histoire partagée et douloureuse, il se heurtera à une Algérie décidée à faire de la force et de l’indépendance ses principaux instruments de dialogue.

Héritages coloniaux et continuité symbolique : La conquête et la colonisation de l’Algérie par la France (1830-1962) furent marquées par une violence systématique : massacres de masse, spoliations foncières et accaparement des richesses. Les travaux de Benjamin Stora (1991), Olivier Le Cour Grandmaison (2005) et Sylvie Thénault (2012) ont montré comment l’administration coloniale mit en œuvre une politique d’expropriation, justifiée par un discours de « mission civilisatrice », mais qui reposait en réalité sur la dépossession et l’exploitation. Des villages entiers furent rasés, les terres les plus fertiles confisquées au profit des colons européens, et des générations d’Algériens réduits à l’indigénat.

C’est dans ce contexte historique qu’il faut comprendre le retournement des mobilités : alors que les colons français se sont installés en Algérie sans « visa », imposant leur présence par la force, ce sont aujourd’hui des générations d’Algériens et de Maghrébins qui vivent en France, non pas en envahisseurs mais comme travailleurs, citoyens et acteurs sociaux. Cette « inversion des flux » est perçue par certains comme une injustice, alors qu’elle illustre en réalité une logique de réciprocité historique, ce que l’anthropologue Abdelmalek Sayad (1999) appelait la « double absence » : l’immigré est à la fois produit de l’histoire coloniale et victime de son refoulement mémoriel.

Loin d’appartenir au passé, ces héritages coloniaux réapparaissent sous des formes symboliques contemporaines. La polémique récente autour d’une carte brandie par l’ambassadeur de France au Maroc — représentant un « Grand Maroc » englobant l’Ouest algérien, le Sahara occidental et la Mauritanie — révèle la persistance d’un imaginaire colonial dans la diplomatie française. Comme l’ont montré Zoubir (2010) et Mundy (2020), la question du Sahara occidental reste un terrain d’ambiguïtés où Paris oscille entre soutien à Rabat et neutralité affichée, au détriment de la reconnaissance des droits des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Ce geste diplomatique, loin d’être anodin, renvoie à une continuité symbolique : la négation des frontières, la remise en cause de la souveraineté algérienne et l’aveuglement face aux traumatismes de la colonisation. Il alimente l’idée largement répandue en Algérie que, malgré les discours officiels de réconciliation, la France n’a jamais véritablement rompue avec ses réflexes impériaux.

Conclusion : La relation franco-algérienne est moins marquée par des alternances politiques que par une constante : l’incapacité de la France à rompre avec ses réflexes coloniaux. La droite assume son hostilité, la gauche la maquille sous un vernis progressiste, mais le fond demeure le même : préserver les intérêts français et nier la souveraineté algérienne.

L’Algérie, forte de son histoire, a compris que la seule voie crédible reste celle de la fermeté et de l’autonomie. La mémoire des massacres, des pillages, mais aussi de la libération de Marseille par des soldats algériens, rappelle que la relation franco-algérienne n’est pas unilatérale, mais bâtie sur une dette historique que la France refuse encore de reconnaître.

Peut-être qu’un jour, comme le suggère une ironie polémique, les héritiers de cette histoire viendront demander pardon en arabe classique, tout en assumant les réparations dues. Mais d’ici là, une certitude demeure : l’Algérie n’obtiendra rien par la supplication, seulement par la force et la fermeté.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

https://kadertahri.blogspot.com/


L’ignominie du colonialisme : Israël, Gaza et les fractures du judaïsme

 


Introduction : Depuis la fondation de l’État d’Israël en 1948, la question israélo-palestinienne cristallise débats académiques et passions politiques. Pour de nombreux chercheurs, ce conflit ne peut se comprendre sans être situé dans le cadre du colonialisme de peuplement (Wolfe, 2006 ; Pappé, 2006), caractérisé par la dépossession des populations autochtones et l’imposition d’un nouvel ordre socio-politique. Gaza, qualifiée de « prison à ciel ouvert » (Finkelstein, 2018 ; Roy, 2016), incarne l’expression contemporaine de cette logique coloniale.

Cet article propose une analyse critique en quatre temps :

  1. Le colonialisme israélien, ses continuités et mutations.
  2. La violence et la résistance dans une dynamique de domination.
  3. La fracture morale entre judaïsme israélien et judaïsme diasporique.
  4. Les perspectives éthiques et politiques pour l’avenir.

Le colonialisme israélien : continuités et transformations : L’établissement d’Israël s’est accompagné de la Nakba, c’est-à-dire l’expulsion de plus de 700 000 Palestiniens (Pappé, 2006 ; Masalha, 2012). Ce processus fondateur a instauré une dynamique de dépossession et de marginalisation qui perdure.

À Gaza, malgré le retrait des colonies en 2005, Israël conserve un contrôle territorial, maritime et aérien, ainsi qu’une domination économique et militaire. Cette enclave de 365 km², peuplée de plus de deux millions d’habitants, reste dépendante de décisions extérieures pour ses ressources vitales. Human Rights Watch (2021) et B’Tselem (2021) qualifient ce système de régime d’apartheid, fondé sur une discrimination structurelle et systématique.

Violence, résistance et cycles de représailles : Les violences du 7 octobre 2023, condamnées au niveau international, s’inscrivent dans une histoire longue de domination et de désespoir. Comme l’a montré Frantz Fanon (1961), la violence coloniale engendre des formes violentes de résistance, perçues par les colonisés comme une libération.

La doctrine israélienne de « tondre la pelouse » (Eiland, 2010) illustre une gestion militaire du conflit : affaiblir le Hamas régulièrement sans chercher de solution politique durable. Les bombardements massifs, documentés par Amnesty International (2023), ont provoqué des milliers de morts civils, renforçant la perception d’un système colonial fondé sur la force brute.

Judaïsme israélien et judaïsme diasporique : une fracture morale ?

Le conflit révèle une tension croissante entre :

  • Le judaïsme israélien, marqué par une logique de survie nationale et de durcissement identitaire.
  • Le judaïsme diasporique, notamment américain, qui continue de valoriser une éthique universaliste fondée sur la justice et la compassion (Levinas, 1969).

Judith Butler (2012) et Shaul Magid (2023) soulignent que le judaïsme en diaspora cherche à se dissocier d’un sionisme perçu comme identitaire et exclusif. Cette divergence pourrait annoncer un repositionnement du judaïsme mondial, où Israël ne serait plus le centre unique de référence.

Colonialisme, morale et avenir : Comme le rappelle Schopenhauer, la compassion est la base de toute morale. Un projet politique qui nie l’humanité de l’Autre est condamné à l’échec. Des intellectuels palestiniens comme Rashid Khalidi (2020) insistent sur la nécessité de dépasser le paradigme colonial pour envisager une paix juste et durable.

La diaspora juive, historiquement engagée dans des luttes pour les droits civiques (Feingold, 1995), pourrait jouer un rôle central dans cette transformation, en s’alliant à d’autres mouvements progressistes et en réaffirmant une tradition éthique de justice et d’égalité.

Conclusion : L’histoire israélo-palestinienne illustre les logiques du colonialisme de peuplement : dépossession, enfermement, cycles de violence. Mais elle révèle également une fracture interne au judaïsme, entre un pôle nationaliste centré sur Israël et un pôle diasporique fidèle à des valeurs universelles. L’avenir dépendra de la capacité à dépasser ce paradigme colonial et à inscrire la coexistence sur le fondement de l’égalité.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

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Le sionisme d’Israël : entre réforme, dépassement et remise en cause

 

Introduction : Depuis plus d’un siècle, le sionisme est au cœur des débats sur l’avenir du peuple juif, la légitimité d’Israël et la place des Palestiniens. Conçu à l’origine comme un projet d’émancipation et de refuge face à l’antisémitisme européen (Herzl, Der Judenstaat, 1896), il est aujourd’hui critiqué pour ses dérives nationalistes et exclusives. Le livre d’Uri Avnery, Israël sans les sionistes (1968), illustre la nécessité d’interroger cette idéologie à la lumière de ses résultats et de ses contradictions internes.

Cet article examine les tensions entre judaïsme, sionisme et Israël, en analysant l’impact du sionisme sur la société israélienne, sur la diaspora juive et sur l’antisémitisme contemporain. La question centrale sera posée : faut-il réformer le sionisme, le dépasser, ou le supprimer ?

Le sionisme : entre idéal fondateur et contradictions internes : Le sionisme, dans sa version initiale, avait pour objectif moral de créer une patrie pour le peuple juif en Palestine. La Déclaration d’indépendance d’Israël en 1948 illustre cet idéal, en affirmant l’égalité complète des droits « sans distinction de religion, de race ou de sexe » (Shlaim, 2014). Cette vision laïque et pluraliste se voulait une garantie contre la domination religieuse et contre toute hiérarchie entre citoyens.
Cependant, les travaux des « nouveaux historiens » israéliens, tels qu’Ilan Pappé (The Ethnic Cleansing of Palestine, 2006) ou Benny Morris (1948 and After, 1990), montrent que la création de l’État s’est accompagnée de déplacements forcés de populations palestiniennes. Ainsi, d’un refuge pour les Juifs persécutés, le sionisme est devenu une idéologie nationale qui, selon ses critiques, tend à légitimer la marginalisation, voire l’expulsion des populations locales.

Israël, la diaspora et l’antisémitisme : L’un des arguments majeurs en faveur du sionisme fut sa fonction protectrice face aux persécutions. Pour les Juifs chassés d’Europe centrale ou du Moyen-Orient (par exemple les communautés d’Irak et d’Iran), Israël a effectivement représenté un refuge (Sasson, The Forgotten Exodus, 2010).
En revanche, pour une large partie de la diaspora, Israël n’a joué qu’un rôle limité dans la lutte contre l’antisémitisme. Comme l’explique Judith Butler (Parting Ways: Jewishness and the Critique of Zionism, 2012), l’État israélien tend à répondre à l’antisémitisme par un nationalisme renforcé plutôt que par des alliances avec d’autres groupes opprimés.
De plus, l’identification systématique entre Israël et la totalité du peuple juif contribue parfois à nourrir de nouvelles formes d’antisémitisme. Brian Klug (2003) distingue ici entre un antisémitisme « classique » (lié aux stéréotypes sur les Juifs) et un « antisémitisme par association », lié à la politique israélienne.

Faut-il réformer, dépasser ou supprimer le sionisme ?

a) Réformer le sionisme: Shlomo Avineri (The Making of Modern Zionism, 1981) souligne la diversité historique du sionisme : socialiste, révisionniste, religieux, culturel. Pour certains, il est donc possible de le réformer en revenant à ses racines pluralistes et en garantissant l’égalité des citoyens. C’est la position de penseurs comme Amos Oz (In the Land of Israel, 1983). Toutefois, l’emprise croissante des courants religieux-nationalistes rend cette réforme difficile.

b) Dépasser le sionisme : Les théoriciens du post-sionisme, tels que Uri Ram (The Changing Agenda of Israeli Sociology, 1995) et Gershon Shafir (Land, Labor and the Origins of the Israeli-Palestinian Conflict, 1989), soutiennent que le sionisme a rempli sa fonction historique et doit céder la place à un cadre politique où la citoyenneté ne serait plus fondée sur l’appartenance ethno-religieuse. Dépasser le sionisme ne signifie pas abolir Israël, mais envisager une société post-nationale et inclusive.

c) Supprimer le sionisme : Pour d’autres auteurs, notamment Edward Said (The Question of Palestine, 1979) et Ilan Pappé, le sionisme est une idéologie coloniale intrinsèquement exclusive et incompatible avec la justice. Dans cette perspective, il devrait être aboli, comme l’apartheid en Afrique du Sud. La solution avancée est celle d’un État unique, démocratique et non confessionnel. Toutefois, cette position reste perçue par la majorité des Juifs comme une menace existentielle.

La diaspora et les stratégies alternatives Historiquement, les communautés juives en diaspora ont développé des stratégies de coexistence et d’alliance avec d’autres groupes marginalisés. Aux États-Unis, les travaux de Cheryl Greenberg (Troubling the Waters: Black-Jewish Relations in the American Century, 2006) montrent que les Juifs ont été actifs dans le mouvement des droits civiques. Aujourd’hui encore, des mouvements juifs progressistes (Jewish Voice for Peace, IfNotNow) plaident pour une solidarité avec les Palestiniens et d’autres minorités, en opposition à une vision exclusivement nationaliste.

Conclusion Le sionisme a répondu à un impératif historique — offrir un refuge aux Juifs persécutés. Mais ses développements contemporains révèlent une tension profonde entre son idéal fondateur d’égalité et la réalité de l’exclusion des Palestiniens. Trois voies se dessinent : le réformer pour le rendre inclusif, le dépasser vers un modèle post-sioniste, ou le supprimer en faveur d’un État démocratique unique. Chacune comporte des avantages et des limites, tant sur le plan moral que politique. Le défi reste de concilier la sécurité et l’autodétermination juives avec la reconnaissance pleine et entière des droits palestiniens. Ce débat conditionnera l’avenir non seulement d’Israël et de la Palestine, mais aussi celui de la diaspora juive et de ses relations avec le monde.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

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