Parfois il m'est utile de le dire !

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Entre peste et choléra : droite/gauche,l’hypocrisie coloniale française face à l’Algérie

 

Introduction : La relation entre l’Algérie et la France reste l’un des points aveugles du débat politique français. À chaque alternance, certains Algériens espèrent que la gauche française représentera un partenaire plus sincère que la droite. Mais cette illusion, persistante depuis les années 1980, n’a cessé de se heurter aux faits : qu’elle soit habillée de promesses socialistes ou d’un discours républicain musclé, la politique française à l’égard de l’Algérie reste fondamentalement coloniale.

Comme l’a montré Benjamin Stora (1991), la mémoire de la guerre d’Algérie est refoulée en France, mais jamais dépassée. Ce refoulé produit une constante : une hostilité de fond, parfois brutale à droite, plus subtile à gauche, mais toujours présente. C’est cette hypocrisie structurelle que nous proposons d’analyser : une France qui ne comprend que la force, une gauche qui masque son poison derrière un peu de miel, et une diplomatie qui trahit la continuité coloniale jusque dans ses gestes symboliques.

La gauche française : le poison sous le miel : L’illusion d’une gauche française « amie » de l’Algérie a été démentie par l’histoire. François Mitterrand en est l’illustration parfaite : célébré à son arrivée au pouvoir en 1981 comme porteur d’un nouvel espoir, il n’était autre que l’ancien ministre de l’Intérieur responsable de la répression coloniale dans les années 1950. Comme le rappelle Todd Shepard (2006), la gauche au pouvoir en 1981 n’a nullement amorcé une rupture mémorielle ou politique avec l’héritage colonial.

Aujourd’hui, les postures de Jean-Luc Mélenchon ou de figures médiatisées comme Rima Hassan ne changent rien au fond : derrière un discours progressiste ou anticolonial de façade, l’Algérie reste perçue comme un objet de gestion diplomatique, non comme un partenaire égal. L’hypocrisie est constante : adoucir le ton pour mieux défendre les mêmes intérêts.

La droite et l’extrême droite, elles, n’ont pas ce souci : elles disent ouvertement leur hostilité. Mais sur le plan des politiques concrètes — migrations, commerce, diplomatie — la différence reste minime.

La France ne comprend que la force : Un constat s’impose : en 132 ans de colonisation comme depuis l’indépendance, Paris n’a jamais cédé par « gentillesse ». C’est la guerre de libération, menée par le FLN et payée au prix de centaines de milliers de morts, qui a contraint la France à partir. Comme l’écrit Mohammed Harbi (2004), « l’État colonial n’a jamais reconnu ses crimes de lui-même, il n’a reculé que devant l’échec militaire et la faillite politique ».

Aujourd’hui encore, l’Algérie ne se fait respecter que lorsqu’elle adopte une ligne dure : réduction de l’usage du français, diversification des partenariats vers la Chine, la Russie, ou la Turquie, et fermeté mémorielle. Ces gestes irritent Paris, mais c’est précisément parce qu’ils affirment la souveraineté algérienne qu’ils obligent la France à écouter.

L’histoire le rappelle : ce sont des soldats algériens qui ont libéré Marseille et la Provence en 1944, alors que l’armée française s’était effondrée en deux semaines en 1940. Dire aux Algériens « rentrez chez vous » relève donc de l’amnésie : les Algériens ne sont pas des intrus en France, ils en ont écrit une page essentielle. Ce rappel historique agit comme une arme polémique mais légitime : il déconstruit le récit d’une France « généreuse » qui aurait accueilli ses anciens colonisés, alors qu’elle leur doit sa propre survie.

Héritages coloniaux : du pillage au Sahara occidental : L’histoire coloniale n’est pas un passé clos. La France est venue en Algérie « sans visa », par la force des armes, en massacrant et pillant les ressources (Le Cour Grandmaison, 2005). Le mouvement migratoire algérien vers la France après 1962 n’a rien d’un « envahissement » : il est le prolongement direct de cette histoire coloniale, comme l’a montré Abdelmalek Sayad (1999). Les Algériens en France ne volent rien : ils travaillent, cotisent, et contribuent.

Les gestes diplomatiques récents confirment la persistance d’une logique coloniale.  Ces gestes nourrissent une conviction largement partagée en Algérie : la France n’a jamais digéré sa défaite de 1962 et continue de cultiver un imaginaire impérial. C’est pourquoi l’idée de réparations, de reconnaissance et même d’excuses publiques refont surface, non comme une provocation, mais comme une nécessité pour solder l’histoire.

Force, mémoire combattante et stratégies algériennes: L’histoire des relations franco-algériennes semble confirmer une constante : la France ne comprend et ne respecte que la force. Déjà, lors de la Révolution française, la logique de l’insurrection violente fut glorifiée comme unique voie vers l’émancipation. De la même manière, ce n’est pas la négociation mais bien la guerre de libération menée par le FLN qui a contraint Paris à quitter l’Algérie en 1962 (Shepard, 2008 ; Stora, 1991).

Ce constat structure encore aujourd’hui les choix stratégiques de l’État algérien. Face aux ambiguïtés françaises, Alger a multiplié les signaux de distanciation : réduction de l’usage du français dans l’enseignement et l’administration (Grandguillaume, 2004), ouverture diplomatique et économique vers la Chine, la Turquie, la Russie et l’Afrique subsaharienne. Loin d’être anecdotiques, ces décisions s’inscrivent dans une logique de souveraineté linguistique et géopolitique, interprétée comme la seule « langue » que Paris comprenne.

Cette dynamique résonne particulièrement avec la mémoire de la diaspora algérienne en France. Nombre de travailleurs algériens et maghrébins ont participé à la Résistance et à la Libération de la France en 1944, notamment dans les combats de Provence et de Marseille (Pervillé, 2002 ; House & MacMaster, 2006). Ces contributions, pourtant décisives, sont largement occultées par les récits nationaux français, qui préfèrent insister sur l’humiliation de la défaite de 1940 ou sur le rôle exclusif de la Résistance française. Ce refoulement mémoriel produit une contradiction criante : des Algériens ont versé leur sang pour libérer la France, alors que leurs descendants sont aujourd’hui sommés de « rentrer chez eux ».

Ainsi, la mémoire combattante des Algériens en France, conjuguée à la stratégie d’autonomisation d’Alger, dessine une leçon de réalisme politique : tant que Paris refusera de reconnaître pleinement cette histoire partagée et douloureuse, il se heurtera à une Algérie décidée à faire de la force et de l’indépendance ses principaux instruments de dialogue.

Héritages coloniaux et continuité symbolique : La conquête et la colonisation de l’Algérie par la France (1830-1962) furent marquées par une violence systématique : massacres de masse, spoliations foncières et accaparement des richesses. Les travaux de Benjamin Stora (1991), Olivier Le Cour Grandmaison (2005) et Sylvie Thénault (2012) ont montré comment l’administration coloniale mit en œuvre une politique d’expropriation, justifiée par un discours de « mission civilisatrice », mais qui reposait en réalité sur la dépossession et l’exploitation. Des villages entiers furent rasés, les terres les plus fertiles confisquées au profit des colons européens, et des générations d’Algériens réduits à l’indigénat.

C’est dans ce contexte historique qu’il faut comprendre le retournement des mobilités : alors que les colons français se sont installés en Algérie sans « visa », imposant leur présence par la force, ce sont aujourd’hui des générations d’Algériens et de Maghrébins qui vivent en France, non pas en envahisseurs mais comme travailleurs, citoyens et acteurs sociaux. Cette « inversion des flux » est perçue par certains comme une injustice, alors qu’elle illustre en réalité une logique de réciprocité historique, ce que l’anthropologue Abdelmalek Sayad (1999) appelait la « double absence » : l’immigré est à la fois produit de l’histoire coloniale et victime de son refoulement mémoriel.

Loin d’appartenir au passé, ces héritages coloniaux réapparaissent sous des formes symboliques contemporaines. La polémique récente autour d’une carte brandie par l’ambassadeur de France au Maroc — représentant un « Grand Maroc » englobant l’Ouest algérien, le Sahara occidental et la Mauritanie — révèle la persistance d’un imaginaire colonial dans la diplomatie française. Comme l’ont montré Zoubir (2010) et Mundy (2020), la question du Sahara occidental reste un terrain d’ambiguïtés où Paris oscille entre soutien à Rabat et neutralité affichée, au détriment de la reconnaissance des droits des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Ce geste diplomatique, loin d’être anodin, renvoie à une continuité symbolique : la négation des frontières, la remise en cause de la souveraineté algérienne et l’aveuglement face aux traumatismes de la colonisation. Il alimente l’idée largement répandue en Algérie que, malgré les discours officiels de réconciliation, la France n’a jamais véritablement rompue avec ses réflexes impériaux.

Conclusion : La relation franco-algérienne est moins marquée par des alternances politiques que par une constante : l’incapacité de la France à rompre avec ses réflexes coloniaux. La droite assume son hostilité, la gauche la maquille sous un vernis progressiste, mais le fond demeure le même : préserver les intérêts français et nier la souveraineté algérienne.

L’Algérie, forte de son histoire, a compris que la seule voie crédible reste celle de la fermeté et de l’autonomie. La mémoire des massacres, des pillages, mais aussi de la libération de Marseille par des soldats algériens, rappelle que la relation franco-algérienne n’est pas unilatérale, mais bâtie sur une dette historique que la France refuse encore de reconnaître.

Peut-être qu’un jour, comme le suggère une ironie polémique, les héritiers de cette histoire viendront demander pardon en arabe classique, tout en assumant les réparations dues. Mais d’ici là, une certitude demeure : l’Algérie n’obtiendra rien par la supplication, seulement par la force et la fermeté.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

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L’ignominie du colonialisme : Israël, Gaza et les fractures du judaïsme

 


Introduction : Depuis la fondation de l’État d’Israël en 1948, la question israélo-palestinienne cristallise débats académiques et passions politiques. Pour de nombreux chercheurs, ce conflit ne peut se comprendre sans être situé dans le cadre du colonialisme de peuplement (Wolfe, 2006 ; Pappé, 2006), caractérisé par la dépossession des populations autochtones et l’imposition d’un nouvel ordre socio-politique. Gaza, qualifiée de « prison à ciel ouvert » (Finkelstein, 2018 ; Roy, 2016), incarne l’expression contemporaine de cette logique coloniale.

Cet article propose une analyse critique en quatre temps :

  1. Le colonialisme israélien, ses continuités et mutations.
  2. La violence et la résistance dans une dynamique de domination.
  3. La fracture morale entre judaïsme israélien et judaïsme diasporique.
  4. Les perspectives éthiques et politiques pour l’avenir.

Le colonialisme israélien : continuités et transformations : L’établissement d’Israël s’est accompagné de la Nakba, c’est-à-dire l’expulsion de plus de 700 000 Palestiniens (Pappé, 2006 ; Masalha, 2012). Ce processus fondateur a instauré une dynamique de dépossession et de marginalisation qui perdure.

À Gaza, malgré le retrait des colonies en 2005, Israël conserve un contrôle territorial, maritime et aérien, ainsi qu’une domination économique et militaire. Cette enclave de 365 km², peuplée de plus de deux millions d’habitants, reste dépendante de décisions extérieures pour ses ressources vitales. Human Rights Watch (2021) et B’Tselem (2021) qualifient ce système de régime d’apartheid, fondé sur une discrimination structurelle et systématique.

Violence, résistance et cycles de représailles : Les violences du 7 octobre 2023, condamnées au niveau international, s’inscrivent dans une histoire longue de domination et de désespoir. Comme l’a montré Frantz Fanon (1961), la violence coloniale engendre des formes violentes de résistance, perçues par les colonisés comme une libération.

La doctrine israélienne de « tondre la pelouse » (Eiland, 2010) illustre une gestion militaire du conflit : affaiblir le Hamas régulièrement sans chercher de solution politique durable. Les bombardements massifs, documentés par Amnesty International (2023), ont provoqué des milliers de morts civils, renforçant la perception d’un système colonial fondé sur la force brute.

Judaïsme israélien et judaïsme diasporique : une fracture morale ?

Le conflit révèle une tension croissante entre :

  • Le judaïsme israélien, marqué par une logique de survie nationale et de durcissement identitaire.
  • Le judaïsme diasporique, notamment américain, qui continue de valoriser une éthique universaliste fondée sur la justice et la compassion (Levinas, 1969).

Judith Butler (2012) et Shaul Magid (2023) soulignent que le judaïsme en diaspora cherche à se dissocier d’un sionisme perçu comme identitaire et exclusif. Cette divergence pourrait annoncer un repositionnement du judaïsme mondial, où Israël ne serait plus le centre unique de référence.

Colonialisme, morale et avenir : Comme le rappelle Schopenhauer, la compassion est la base de toute morale. Un projet politique qui nie l’humanité de l’Autre est condamné à l’échec. Des intellectuels palestiniens comme Rashid Khalidi (2020) insistent sur la nécessité de dépasser le paradigme colonial pour envisager une paix juste et durable.

La diaspora juive, historiquement engagée dans des luttes pour les droits civiques (Feingold, 1995), pourrait jouer un rôle central dans cette transformation, en s’alliant à d’autres mouvements progressistes et en réaffirmant une tradition éthique de justice et d’égalité.

Conclusion : L’histoire israélo-palestinienne illustre les logiques du colonialisme de peuplement : dépossession, enfermement, cycles de violence. Mais elle révèle également une fracture interne au judaïsme, entre un pôle nationaliste centré sur Israël et un pôle diasporique fidèle à des valeurs universelles. L’avenir dépendra de la capacité à dépasser ce paradigme colonial et à inscrire la coexistence sur le fondement de l’égalité.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

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Le sionisme d’Israël : entre réforme, dépassement et remise en cause

 

Introduction : Depuis plus d’un siècle, le sionisme est au cœur des débats sur l’avenir du peuple juif, la légitimité d’Israël et la place des Palestiniens. Conçu à l’origine comme un projet d’émancipation et de refuge face à l’antisémitisme européen (Herzl, Der Judenstaat, 1896), il est aujourd’hui critiqué pour ses dérives nationalistes et exclusives. Le livre d’Uri Avnery, Israël sans les sionistes (1968), illustre la nécessité d’interroger cette idéologie à la lumière de ses résultats et de ses contradictions internes.

Cet article examine les tensions entre judaïsme, sionisme et Israël, en analysant l’impact du sionisme sur la société israélienne, sur la diaspora juive et sur l’antisémitisme contemporain. La question centrale sera posée : faut-il réformer le sionisme, le dépasser, ou le supprimer ?

Le sionisme : entre idéal fondateur et contradictions internes : Le sionisme, dans sa version initiale, avait pour objectif moral de créer une patrie pour le peuple juif en Palestine. La Déclaration d’indépendance d’Israël en 1948 illustre cet idéal, en affirmant l’égalité complète des droits « sans distinction de religion, de race ou de sexe » (Shlaim, 2014). Cette vision laïque et pluraliste se voulait une garantie contre la domination religieuse et contre toute hiérarchie entre citoyens.
Cependant, les travaux des « nouveaux historiens » israéliens, tels qu’Ilan Pappé (The Ethnic Cleansing of Palestine, 2006) ou Benny Morris (1948 and After, 1990), montrent que la création de l’État s’est accompagnée de déplacements forcés de populations palestiniennes. Ainsi, d’un refuge pour les Juifs persécutés, le sionisme est devenu une idéologie nationale qui, selon ses critiques, tend à légitimer la marginalisation, voire l’expulsion des populations locales.

Israël, la diaspora et l’antisémitisme : L’un des arguments majeurs en faveur du sionisme fut sa fonction protectrice face aux persécutions. Pour les Juifs chassés d’Europe centrale ou du Moyen-Orient (par exemple les communautés d’Irak et d’Iran), Israël a effectivement représenté un refuge (Sasson, The Forgotten Exodus, 2010).
En revanche, pour une large partie de la diaspora, Israël n’a joué qu’un rôle limité dans la lutte contre l’antisémitisme. Comme l’explique Judith Butler (Parting Ways: Jewishness and the Critique of Zionism, 2012), l’État israélien tend à répondre à l’antisémitisme par un nationalisme renforcé plutôt que par des alliances avec d’autres groupes opprimés.
De plus, l’identification systématique entre Israël et la totalité du peuple juif contribue parfois à nourrir de nouvelles formes d’antisémitisme. Brian Klug (2003) distingue ici entre un antisémitisme « classique » (lié aux stéréotypes sur les Juifs) et un « antisémitisme par association », lié à la politique israélienne.

Faut-il réformer, dépasser ou supprimer le sionisme ?

a) Réformer le sionisme: Shlomo Avineri (The Making of Modern Zionism, 1981) souligne la diversité historique du sionisme : socialiste, révisionniste, religieux, culturel. Pour certains, il est donc possible de le réformer en revenant à ses racines pluralistes et en garantissant l’égalité des citoyens. C’est la position de penseurs comme Amos Oz (In the Land of Israel, 1983). Toutefois, l’emprise croissante des courants religieux-nationalistes rend cette réforme difficile.

b) Dépasser le sionisme : Les théoriciens du post-sionisme, tels que Uri Ram (The Changing Agenda of Israeli Sociology, 1995) et Gershon Shafir (Land, Labor and the Origins of the Israeli-Palestinian Conflict, 1989), soutiennent que le sionisme a rempli sa fonction historique et doit céder la place à un cadre politique où la citoyenneté ne serait plus fondée sur l’appartenance ethno-religieuse. Dépasser le sionisme ne signifie pas abolir Israël, mais envisager une société post-nationale et inclusive.

c) Supprimer le sionisme : Pour d’autres auteurs, notamment Edward Said (The Question of Palestine, 1979) et Ilan Pappé, le sionisme est une idéologie coloniale intrinsèquement exclusive et incompatible avec la justice. Dans cette perspective, il devrait être aboli, comme l’apartheid en Afrique du Sud. La solution avancée est celle d’un État unique, démocratique et non confessionnel. Toutefois, cette position reste perçue par la majorité des Juifs comme une menace existentielle.

La diaspora et les stratégies alternatives Historiquement, les communautés juives en diaspora ont développé des stratégies de coexistence et d’alliance avec d’autres groupes marginalisés. Aux États-Unis, les travaux de Cheryl Greenberg (Troubling the Waters: Black-Jewish Relations in the American Century, 2006) montrent que les Juifs ont été actifs dans le mouvement des droits civiques. Aujourd’hui encore, des mouvements juifs progressistes (Jewish Voice for Peace, IfNotNow) plaident pour une solidarité avec les Palestiniens et d’autres minorités, en opposition à une vision exclusivement nationaliste.

Conclusion Le sionisme a répondu à un impératif historique — offrir un refuge aux Juifs persécutés. Mais ses développements contemporains révèlent une tension profonde entre son idéal fondateur d’égalité et la réalité de l’exclusion des Palestiniens. Trois voies se dessinent : le réformer pour le rendre inclusif, le dépasser vers un modèle post-sioniste, ou le supprimer en faveur d’un État démocratique unique. Chacune comporte des avantages et des limites, tant sur le plan moral que politique. Le défi reste de concilier la sécurité et l’autodétermination juives avec la reconnaissance pleine et entière des droits palestiniens. Ce débat conditionnera l’avenir non seulement d’Israël et de la Palestine, mais aussi celui de la diaspora juive et de ses relations avec le monde.

Kader Tahri
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Hommages aux Françaises du FLN, c’est honorer le courage, pas la violence

 

Hommage à celles qui ont fait don de soi pour une juste cause, ces femmes Algériennes d’origine Européenne, étaient mues par un seul idéal libérer l’Algérie du joug colonial.  Ces combattantes pour montrer un exemple tout simplement de courage et de foi  ont lutté pour l’indépendance de l’Algérie. Hommage à leur lutte et leurs sacrifices pour la liberté et la dignité du peuple algérien

On nous dit qu’honorer des Françaises qui se sont engagées aux côtés du FLN pendant la guerre d’Algérie serait une «mode». Que ce serait insulter la France.

Non : c’est juste rappeler une vérité historique que certains voudraient encore enterrer.

Le récit tronqué des nostalgiques de l’Algérie française

Quand une partie de la presse nous parle du 1er novembre 1954, elle décrit des victimes françaises avec force détails. Mais elle passe sous silence les milliers d’Algériens tués, torturés, disparus sous la botte coloniale. Elle ne dit rien des massacres de Sétif et Guelma en 1945, rien des exécutions sommaires, rien des villages rasés, rien de la torture systématisée. Comme si la violence avait commencé le jour où les colonisés ont osé dire « assez ».

Ce récit tronqué n’est pas innocent : il vise à délégitimer toute mémoire anticoloniale et à faire passer des femmes comme Annie Steiner ou Danièle Amrane-Minne pour de simples « complices de terroristes ».

Ces femmes n’ont pas trahi la France, elles ont refusé l’injustice

Annie Steiner et Danièle Amrane-Minne n’ont pas pris les armes par goût du sang. Elles ont fait un choix politique et moral : celui de refuser de se ranger du côté de l’oppresseur. Comme des Français s’étaient engagés dans les Brigades internationales en Espagne, ou dans la Résistance contre l’occupant nazi, elles ont choisi la solidarité avec un peuple colonisé.

Annie Steiner a lutté contre la colonisation. En 1956, elle a été arrêtée et emprisonnée à la prison Barberousse à Alger, où elle a rencontré d’autres combattantes pour l’indépendance de l’Algérie. Elle a ensuite été transférée en France avant d’être libérée en 1961. Dès l’indépendance de l’Algérie en 1962 elle a choisi la nationalité algérienne et est retourné vivre dans son pays.

La militante, historienne et poétesse Djamila Amrane-Minne, née Danièle Minne, En rejoignant Les maquis après la grève des étudiants (19 Mai 1956) Née Danièle, adopta en premier lieu son pseudonyme de guerre qui n’est autre que « Djamila » avant qu’il ne devienne son identité Officielle après l’indépendance,  Djamila Amrane a rejoint les réseaux du FLN à Alger en compagnie des fameuses poseuses de bombes, a l’instar de Djamila Boupacha, Djamila Bouhired, Djamila Bouazza, Zohra Drif et plusieurs qui se sont sacrifiées pour la nation, Alors qu’elle n’avait à l’époque que 17 ans,. Condamnée le 4 décembre 1957 puis incarcérée à la prison de Barberousse, elle a été par la suite transférée en France avant qu’elle ne soit amnistiée en avril 1962 grâce aux Accords d’Évian.

Et qu’on le veuille ou non, l’histoire leur a donné raison : l’Algérie a gagné son indépendance, et la colonisation est aujourd’hui universellement reconnue comme un système de domination injustifiable.

Honorer, ce n’est pas glorifier la violence

Personne n’efface les victimes civiles. Mais réduire ces femmes à des « poseuses de bombes » est une falsification de l’histoire. Les municipalités qui leur rendent hommage ne célèbrent pas les attentats : elles rappellent que, dans la France coloniale, il y eut aussi des Françaises capables de dire non, capables de passer de l’autre côté, capables de se battre pour l’égalité et la dignité.

Une mémoire partagée ou pas de mémoire du tout

La guerre d’Algérie n’appartient pas aux nostalgiques de l’OAS ni aux défenseurs d’une mémoire amputée. Elle appartient à toutes et tous, et surtout à celles et ceux qui refusent l’oubli sélectif.

Oui, donner le nom d’Annie Steiner ou de Danièle Amrane-Minne à des bâtiments publics est un choix politique. Et c’est un choix salutaire. Car il rappelle que l’histoire de la France ne se résume pas à l’histoire des dominants, mais aussi à celle de celles et ceux qui ont eu le courage de les défier.

La municipalité en plus du magazine municipal rappelait récemment que le choix avait été validé en conseil municipal, l’adjointe au maire Sophia Brikh l’expliquant ainsi : « Refusant de voir le système colonial réduire les Algériens à la misère et à l’exploitation, Annie Steiner plaçait les valeurs de liberté au-dessus de tout, ce qui l’amènera à adhérer au Front de libération national ».

Au cours d’un voyage en Algérie en 2022, « nous avons alors découvert ces hommes et ces femmes, Français ou Algériens de naissance, qui ont combattu ensemble et d’une seule voix le racisme et le colonialisme pour leurs valeurs humanistes. Annie Steiner était de ceux-là. »

Kader Tahri
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Génocide à Gaza : tuer le messager ne tuera jamais le message

 

Depuis le 7 octobre 2023, Gaza est une zone fermée aux journalistes internationaux. Les seules voix capables de relater les bombardements, les destructions et les famines sont celles des reporters palestiniens, enracinés dans leur territoire, travaillant souvent pour de grands médias mondiaux comme CNN, l’AFP ou Al Jazeera. Pourtant, ces journalistes sont devenus des cibles directes : assassinés, menacés, ou décrédibilisés. En les réduisant au silence, c’est la réalité du peuple palestinien qui disparaît de l’espace médiatique.

La stratégie de la calomnie et du discrédit

Comme le disait Francis Bacon : « Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose. » Cette maxime s’applique tragiquement aux journalistes de Gaza.
Le gouvernement israélien, relayé par certains relais médiatiques complaisants, justifie chaque frappe mortelle en accusant les reporters de « liens avec le Hamas ». Une mécanique bien huilée : des photos issues de téléphones ou de réseaux sociaux, fournies par une « cellule de légitimation » du renseignement, servent à construire des accusations sans preuve.
Tous les Palestiniens sont accusés de mentir systématiquement et cette accusation  globale d'être "un terroriste" est méthodiquement utilisée pour justifier les massacres à Gaza, comme l'a dénoncé à plusieurs reprises RSF. L’armée israélienne affirme toujours, elle visait spécifiquement des « terroristes » utilisant un drone mais sans jamais étayer ces affirmations

On est tous des terroristes dans les yeux des Israéliens et surtout de l'armée d'occupation, mais tuer le messager ne tuera jamais le message" a martelé le journaliste palestinien francophone, Rami Abou Jamous, depuis Gaza.  

Grâce à des documents inédits issus de plusieurs ministères israéliens, montrent la stratégie déployée par le gouvernement d’Israël pour organiser son impunité devant les juridictions internationales. Et comment certains journalistes palestiniens, ou les ONG qui les défendent, sont accusés de terrorisme.

Cette propagande vise à déshumaniser les journalistes, pour mieux légitimer leur élimination. Mais la réalité est claire : ces professionnels informent, ils ne militent pas.

Menaces directes : « On sait où vous êtes »

Au-delà de la propagande, l’intimidation est directe. Nombre de reporters de Gaza ont reçu sur WhatsApp ce message glaçant de l’armée israélienne : « On sait où vous êtes, vous vous taisez ou on vous cible. »Ce n’est plus seulement une guerre militaire, c’est une guerre contre l’information. Empêcher les témoins, c’est empêcher la vérité. Empêcher la vérité, c’est laisser le champ libre au mensonge.

La mobilisation des journalistes français

Face à ces assassinats, les syndicats de journalistes français (SNJ-CGT, SNJ, FO, CFDT) et une quarantaine de sociétés de journalistes (SDJ) ont pris position.
Ils dénoncent un « massacre organisé », une volonté délibérée de réduire au silence ceux qui témoignent. Ils exigent :

  • des enquêtes internationales indépendantes ;
  • la garantie de la sécurité des journalistes sur place ;
  • l’exfiltration des reporters palestiniens liés à des médias français ;
  • l’ouverture de Gaza à la presse internationale.

Leur message est clair : les campagnes de décrédibilisation doivent cesser. Ces journalistes, qui risquent leur vie chaque jour, méritent respect et soutien, pas suspicion.

En assassinant des journalistes, on assassine la liberté de la presse

Chaque journaliste tué à Gaza n’est pas seulement une victime individuelle. C’est un fragment de vérité qu’on enterre, une voix qu’on étouffe, une mémoire collective qu’on efface.
En assassinant les journalistes, on assassine la liberté de la presse. En assassinant la liberté de la presse, on assassine la vérité.
Et sans vérité, l’opinion publique mondiale reste aveugle face au génocide en cours, aux destructions massives, à la famine imposée.

Un devoir de solidarité et de vérité

Je m’associe à cette mobilisation. Car défendre les journalistes de Gaza, c’est défendre bien plus que des vies. C’est défendre :

  • la liberté d’informer, socle de toute démocratie ;
  • la mémoire des victimes palestiniennes ;
  • le droit des peuples à la vérité, face aux mensonges d’État.

Il ne s’agit pas d’un conflit lointain. C’est un enjeu universel : si nous tolérons qu’on exécute des journalistes à Gaza dans l’indifférence, alors demain, partout dans le monde, la presse pourra être réduite au silence.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
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Free Gaza : quand un tag devient une arme d’instrumentalisation

 

 Un tag “Free Gaza” sur une plaque commémorative choque, indigne, divise. Mais au-delà du geste, c’est son utilisation médiatique et politique qui interroge : comment un graffiti devient-il une arme d’instrumentalisation, brouillant mémoire et débat public

À chaque fois qu’un tag apparaît sur une synagogue, une plaque commémorative ou un monument, deux réflexes s’entrechoquent : la condamnation immédiate et l’accusation de complotisme. D’un côté, certains y voient une preuve renouvelée de la persistance de la haine antisémite. De l’autre, certains soupçonnent un “faux drapeau”, une mise en scène destinée à choquer l’opinion, provoquer une indignation sélective et couper court à toute critique d’Israël.

C’est une arme rhétorique, pas un argument. il faut sortir de ce piège.

Car la réalité est double :

·         Oui, ces tags existent, et ils sont une offense réelle, une blessure faite à la mémoire ou à une communauté.

·         Mais oui aussi, certains de ces actes peuvent être instrumentalisés. Ils deviennent alors non plus seulement un crime isolé, mais un outil rhétorique : ils permettent de disqualifier toute voix critique en l’associant à l’antisémitisme, et d’interrompre le débat avant même qu’il n’ait lieu.

C’est cette mécanique qu’il faut dénoncer. Les théories du complot ont tort quand elles réduisent chaque événement à une manipulation globale et machiavélique. Mais elles posent malgré elles une question légitime :

Qui bénéficie de la diffusion massive d’un slogan haineux ?

Pourquoi un tag, qui pourrait être effacé en quelques secondes, devient-il soudain la une des médias ?

Le problème n’est pas de condamner l’acte – il doit l’être sans ambiguïté. Le problème est de voir comment la surmédiatisation transforme une provocation marginale en arme politique centrale. Le problème est quand une inscription de trois mots sur un mur pèse plus lourd dans l’espace public que des centaines de morts civils dans une guerre.

Quel charivari de mensonges honteux ! Des milliers de Palestiniens sont massacrés non seulement à Gaza, mais aussi en Cisjordanie. Je suppose que les colons ont de bonnes intentions pacifiques, n'est-ce pas ? Honte à vous de soutenir ces crimes.

 

Cela n'a fait que dévaloriser ces termes, tout comme le terme antisémite est devenu vide de sens. Hélas. Et pourtant, la plupart des Israéliens refusent de voir les preuves qui se présentent à eux. Israël et ses citoyens commettent un génocide ! Faut-il être aveugle ?

 

Tous à 86% d'antisémites je présume ?

Qu'est-ce qui pourrait expliquer cela d'autre, n'est-ce pas ?

 

Ainsi, parler de “faux drapeau” ne doit pas nous enfermer dans une vision complotiste. Il faut plutôt comprendre que, quelle que soit l’origine de ces tags, leur impact réel vient de la manière dont ils sont utilisés : non pas pour ouvrir un débat, mais pour le verrouiller.

Au fond, certains “voient des complots partout”. Mais d’autres, à l’inverse, refusent de voir la moindre instrumentalisation. Ces deux aveuglements se rejoignent dans leur incapacité à penser la complexité.

La voie juste est ailleurs :

·         condamner fermement tout acte antisémite,

·         mais refuser que cette condamnation serve de prétexte pour délégitimer toute critique d’un État ou pour hiérarchiser les indignations.

Ce n’est pas être complotiste que de rappeler qu’un tag sur une plaque ne doit pas occulter des crimes de guerre. C’est plus manipulateur de dire qu’un hôpital détruit ou une école bombardée méritent autant, sinon davantage, d’indignation publique qu’un graffiti, aussi ignoble soit-il. On peut pleurer les enfants de Gaza sans banaliser Auschwitz. Refuser l’un ne signifie pas nier l’autre. Les vraies luttes de justice ne s’opposent pas : elles s’additionnent et surtout refuser de choisir entre les victimes.

Bref :

·         Oui, les complots imaginaires existent, et ils enferment ceux qui s’y perdent.

·         Mais oui aussi, l’instrumentalisation existe, et la lucidité consiste à la dénoncer sans céder au soupçon généralisé.

Aux indignés sélectionnés, vous êtes toujours prompts à vous indigner pour une plaque de marbre taguée, qu’un peu d’eau et un chiffon suffiraient à nettoyer mais jamais pour la destruction de dizaines d’hôpitaux ou d’écoles, pourtant essentiels à des millions de vies.

Aux indignés sélectionnés, vous êtes toujours prompts à vous émouvoir pour un arbre abattu, qui, lui, repoussera, plutôt que pour la mort de dizaines de milliers d’innocents, à commencer par des enfants.

Aux indignés sélectionnés vous êtes toujours prompts à dénoncer quelques inscriptions sur des murs encore debout, mais pas la destruction entière d’une région, pas la colonisation d’un peuple tout entier, jamais pour l’occupation d’un pays.

Aux indignés sélectionnés vous êtes toujours prompts à vous offusquer de quelques paroles déplacées, voire blessantes, mais jamais de celles accompagnées d’actes visant à l’éradication d’un peuple.

Aux indignés sélectionnés vous êtes toujours prompts à crier au danger face à la destruction hypothétique d’un État nucléaire, mais silencieux face aux actes qui visent à effacer jusqu’à l’idée même qu’un peuple opprimé puisse un jour obtenir son indépendance sur la terre qui est la sienne.

Aux indignés sélectionnés vous êtes, définitivement, une imposture. Des opportunistes qui instrumentalisent la peur et la mémoire de la Shoah pour justifier une entreprise coloniale au-delà de vos frontières.

Aux indignés sélectionnés vous vous obstinez à associer les juifs à Israël dans vos discours tel des racistes voudraient associer tous les allemands aux Nazis

La dignité humaine exige mieux que des slogans. Elle demande d’être capable d’indignation double : pour un mur profané ici, pour une école bombardée là-bas. Pour des enfants assassinés hier, comme pour des enfants massacrés aujourd’hui.

Ce n’est qu’à ce prix – en refusant les amalgames, en tenant ensemble les mémoires, en refusant la hiérarchie des souffrances – que nous serons fidèles à ce que nous prétendons défendre : la justice, la vérité et l’humanité.

Refuser les faux dilemmes, refuser les amalgames, refuser les indignations sélectives : c’est la seule manière de rendre justice à toutes les victimes, ici comme ailleurs.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

https://kadertahri.blogspot.com/


 

Gaza, le nom du génocide

 

L’Association internationale des chercheurs sur le génocide vient de rendre un verdict sans appel : Israël commet un génocide à Gaza. 86 % de ses membres, parmi les plus grands spécialistes mondiaux, ont adopté une résolution affirmant que les critères juridiques sont remplis. Pas une pétition militante. Pas une opinion de circonstance. Mais une conclusion scientifique, juridique, documentée, qui renvoie à la Convention de 1948 sur la prévention et la répression du crime de génocide.

Que dit cette Convention ? Qu’il y a génocide lorsqu’un groupe national, ethnique, racial ou religieux est détruit « en tout ou en partie » par des actes tels que : tuer ses membres, infliger des atteintes graves, imposer des conditions d’existence menant à leur destruction, empêcher les naissances ou transférer les enfants.

À Gaza, tout est réuni. Les morts par dizaines de milliers. Les mutilés, les disparus, les familles entières effacées. La famine organisée comme arme de guerre. Les déplacements forcés. L’interdiction d’aide humanitaire. Les hôpitaux, les écoles, les camps de réfugiés bombardés. Le génocide n’est pas une exagération rhétorique : c’est une réalité, et Israël en porte la responsabilité.


Le mensonge permanent

Face à cela, Israël nie. Son ministère des Affaires étrangères dénonce une « honte », accuse le Hamas de mensonges. Mais les faits sont implacables : plus de 63 000 morts palestiniens depuis octobre 2023, une bande de terre transformée en ruines, une population privée d’eau, de nourriture, de soins, de refuge.

Chaque génocide s’accompagne du déni. Chaque fois, les criminels se parent des mots de « sécurité » et de « légitime défense ». Mais ce langage ne résiste pas aux images, aux chiffres, aux témoignages.


Le 7 octobre : résistance et déformation

On nous répète sans cesse que tout a commencé le 7 octobre. C’est faux. Le 7 octobre n’est pas le point de départ, mais une conséquence : celle de décennies d’occupation, d’apartheid et de blocus.

En droit international, un peuple colonisé a le droit de résister, y compris par la lutte armée. Assimiler cette résistance à un « crime » équivalent au génocide, c’est inverser les rôles : faire de l’occupé le coupable, et de l’occupant le juge.

Les faits, de plus, contredisent la propagande : les attaques du Hamas visaient principalement des cibles militaires, et les otages étaient pour l’essentiel des soldats ou d’anciens militaires. Mais peu importe : dans le récit dominant, tout Palestinien qui résiste devient terroriste, quand tout Israélien armé devient victime innocente.

La vérité est simple : criminaliser la résistance d’un peuple colonisé, tout en couvrant la destruction systématique de ce peuple, c’est offrir une caution morale au génocide.


Un gouvernement otage de l’extrême droite

Et qui mène aujourd’hui cette politique ? Un gouvernement israélien de coalition, dominé par une poignée de députés extrémistes. Netanyahou, pour sauver sa carrière, a offert un pouvoir démesuré à des figures marginales comme Orit Strook, incarnation du sionisme religieux le plus radical. Ces individus, incapables de franchir seuls le seuil électoral, imposent désormais à tout un État leur projet messianique : effacer Gaza, coûte que coûte.

Voilà la réalité : un gouvernement minoritaire, sans véritable mandat populaire, entraîne une nation entière dans la guerre d’anéantissement.


Le double standard occidental

Pendant que Gaza est écrasée, la Cisjordanie est livrée aux colons, qui multiplient les attaques et les spoliations. Et l’Occident, prisonnier de son hypocrisie, continue de répéter les slogans dictés par Tel-Aviv.

« Droit à la défense ». « Lutte contre le terrorisme ». Ces formules creuses masquent l’évidence : nous assistons à une destruction programmée, méthodique, assumée. Et par nos silences, nos armes, nos vetos, nous sommes complices.


Redonner un sens aux mots

On dit parfois que les mots « génocide » et « antisémitisme » ont perdu leur force à force d’être instrumentalisés. Gaza leur rend aujourd’hui leur sens premier. Ce n’est plus une métaphore, c’est un constat. Ce n’est plus un abus, c’est une vérité.

Nommer Gaza, c’est nommer un génocide. Refuser ce mot, c’est participer au mensonge.


Le choix devant l’Histoire

Désormais, nul ne pourra dire : « Nous ne savions pas ». Les chercheurs l’ont établi, les juristes l’ont écrit, les faits l’ont démontré. Gaza est le théâtre d’un génocide.

 

Alors, chacun doit choisir.
Se taire, et devenir complice.
Ou parler, et refuser d’être réduit à la honte.

L’Histoire jugera les assassins. Mais elle jugera aussi ceux qui se sont tus.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

https://kadertahri.blogspot.com/

 

IAGS Resolution on Gaza, August 2025

https://genocidescholars.org/wp-content/uploads/2025/08/IAGS-Resolution-on-Gaza-FINAL.pdf