Parfois il m'est utile de le dire !

                                                                                                          Oh! Colombe, transmets mon salut d...

Le triomphisme de l’extrême droite : une “victoire” vide et une manœuvre sournoise

Le Rassemblement national se félicite d’une prétendue victoire parlementaire : l’adoption symbolique d’une résolution visant à dénoncer les accords migratoires de 1968 entre la France et l’Algérie. En réalité, cette opération n’a rien d’une avancée politique ; elle n’est qu’une démonstration de communication, une mise en scène du pouvoir destinée à faire oublier son impuissance réelle.

Le texte triomphaliste publié dans la presse d’extrême droite n’en fait pas mystère : peu importe la portée juridique — inexistante — de la résolution, l’essentiel est de faire croire que Marine Le Pen et son camp “agissent”, là où le reste de la classe politique serait paralysé. C’est là toute la mécanique populiste : transformer un non-événement institutionnel en victoire symbolique, pour nourrir le récit du “peuple trahi par les élites”.

Une victoire sans effet, une illusion de souveraineté

Les accords franco-algériens de 1968 ont déjà été révisés plusieurs fois (1985, 1994, 2001). Les dénoncer unilatéralement serait contraire au droit international. Ce vote n’a donc aucune conséquence juridique, puisqu’il relève d’une relation diplomatique bilatérale. Le RN le sait parfaitement.
Mais la vérité juridique n’intéresse pas le RN : seul compte l’effet de scène, l’image d’une France “reprenant le contrôle” face à un adversaire fantasmé, l’Algérie.

Cette stratégie est ancienne : fabriquer des victoires symboliques pour masquer la vacuité programmatique. Derrière les effets de manche, rien ne vient répondre aux véritables enjeux migratoires, économiques ou sociaux. Le RN n’a pas de politique, seulement des ennemis.

Le peuple instrumentalisé

Le texte triomphaliste évoque une population “à 72 % favorable au rejet” des accords, sans jamais citer de source. C’est une technique bien rodée : faire parler “le peuple” à la place du peuple.
Le RN se présente comme le porte-voix des “vrais Français”, mais c’est lui qui sélectionne, interprète, et simplifie leurs colères pour les transformer en consentement à la peur.

Réduire la complexité sociale à un chiffre creux, c’est refuser la politique pour lui substituer une émotion dirigée : la rancune.
Le “pays réel” dont parle l’extrême droite n’existe que dans son imaginaire. Le vrai pays, lui, est pluriel, traversé de solidarités, de débats, de contradictions — tout ce que le RN méprise.

Le “front républicain” : cible stratégique du RN

L’auteur de cet article se réjouit de “l’effritement du front républicain”. Ce n’est pas anodin : depuis des années, l’extrême droite mène une offensive culturelle pour banaliser son discours et dissoudre les réflexes antifascistes.
Le RN cherche moins à gagner des élections qu’à faire perdre la mémoire. Son objectif : que voter avec lui ne paraisse plus scandaleux, que “l’interdit de la peste brune” tombe enfin.

Mais qu’on ne s’y trompe pas : ce qu’il appelle “désunion des têtes molles” est en réalité la fragilisation du socle démocratique. Le “front républicain” n’est pas un réflexe partisan ; c’est une ligne de défense contre la haine comme principe politique. L’attaquer, c’est fragiliser l’idée même de République.

La revanche coloniale travestie en patriotisme

Au cœur de cette rhétorique se niche un autre poison : le ressentiment postcolonial.
En s’attaquant aux accords de 1968, le RN ravive le mythe d’une France “humiliée” par l’Algérie, d’une relation inégale à renverser. C’est le vieux rêve d’une revanche sur l’histoire.
Ce discours n’a rien à voir avec la souveraineté : il relève du fantasme impérial blessé.
L’Algérie y devient le miroir commode de toutes les frustrations françaises : la désindustrialisation, la précarité, la peur du déclin.
Plutôt que d’en affronter les causes structurelles, le RN préfère désigner un coupable extérieur — étranger, musulman, ancien colonisé.

Réaffirmer une autre idée de la République

Face à ce théâtre d’ombres, notre tâche militante est claire : réaffirmer une République sociale, antiraciste et universaliste.
Non pas une République du rejet, mais une République du lien.
Non pas une souveraineté du repli, mais une souveraineté du partage.

Les relations entre la France et l’Algérie sont une question politique, historique et humaine — pas une obsession identitaire. Les immigrés algériens ont contribué à construire la France contemporaine, dans les usines, les hôpitaux, les quartiers populaires. Les traiter en menace, c’est insulter notre propre histoire.

Conclusion : refuser la victoire du mensonge

Le RN n’a remporté aucune victoire politique. Il a simplement réussi à imposer son récit : celui d’un pays cerné, trahi, assiégé.
Notre réponse doit être à la hauteur : démonter ce récit, point par point, sans jamais céder à sa logique de peur.

Loin d’être un instrument de souveraineté, la dénonciation unilatérale de l’accord franco-algérien de 1968 serait, une rupture illégale, diplomatiquement risquée et politiquement inefficace, qui risquerait d’ouvrir plus de portes qu’elle n’en fermerait Ce n’est pas une France contre l’Algérie, mais une France avec tous ceux qui, d’ici et de là-bas, continuent de croire à la justice et à la fraternité.

A/Kader Tahri / Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »  
https://kadertahri.blogspot.com/

 

Makhzen/Sahara occidental : le triomphalisme médiatique avant vote

À la veille du vote du Conseil de sécurité sur le Sahara occidental, toute  la presse marocaine annonce déjà une “victoire historique” du plan d’autonomie. Mais derrière le récit triomphal, le droit international, lui, reste inchangé.

Ce que dit réellement le droit international

Depuis l’avis consultatif rendu le 16 octobre 1975 par la Cour internationale de Justice (CIJ), la position du droit international est claire :

Il n’existe aucun lien juridique de souveraineté entre le Royaume du Maroc et le territoire du Sahara occidental.” [1]

Autrement dit, le Sahara occidental reste un territoire non autonome soumis au processus de décolonisation des Nations unies. La CIJ a rappelé que seul le peuple sahraoui a le droit de décider de son avenir — par un processus d’autodétermination librement exprimé.

Le vote attendu au Conseil de sécurité ne modifie pas ce cadre : ni une résolution de prorogation de la MINURSO, ni une formulation “favorable à l’autonomie” ne peuvent, à elles seules, changer le statut juridique du territoire.

Une résolution politique, pas un changement de souveraineté

 Le projet de résolution porté par les États-Unis, souvent désignés comme « porte-plume », reprend une formule déjà utilisée :

“Le plan d’autonomie marocain est sérieux, crédible et réaliste, et constitue une base pour parvenir à une solution.” [2]

Mais “base de solution” ≠ “reconnaissance de souveraineté”.
Le Conseil encourage une négociation politique entre les parties (Maroc, Front Polisario, Algérie, Mauritanie) ; il ne tranche pas la question de souveraineté.

Même les passages vantés comme « prééminence du plan d’autonomie » n’ont qu’une valeur politique : ils reflètent une tendance diplomatique, non une décision juridique.

Le mythe du vote acquis

La presse Marocaine affirme que “neuf voix sont assurées” et que “le texte passera sans veto”. Or, cette certitude relève de la spéculation.
Les votes du Conseil dépendent souvent d’amendements de dernière minute, d’équilibres régionaux et d’échanges bilatéraux :

  • La Russie a demandé à “rééquilibrer” certains passages jugés trop favorables à Rabat ;
  • La Chine continue d’appeler à “une solution politique mutuellement acceptable” ;
  • Le Guyana, la Slovénie ou le Pakistan restent prudents malgré des pressions diplomatiques.

Même les pays européens, traditionnellement proches du Maroc, insistent sur la formule d’“une solution juste, durable et mutuellement acceptable”. [3]
Ce langage de compromis, volontairement flou, permet d’éviter de se prononcer sur la souveraineté.

Quand la communication précède la diplomatie

Pourquoi proclamer une victoire avant même le vote ?
Parce qu’en diplomatie interne, le symbole prime sur la procédure. La communication triomphaliste vise à :

  • Rassurer l’opinion publique marocaine, en lui présentant la cause nationale comme déjà gagnée ;
  • Façonner la perception internationale, en créant l’illusion d’un consensus ;
  • Désamorcer les critiques internes (notamment sur les lenteurs du processus politique).

Mais ce discours ne résiste pas à l’examen juridique. Les Nations unies n’ont jamais reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, et la MINURSO reste mandatée pour superviser un processus d’autodétermination.

Politique ≠ juridique

“Un texte diplomatique peut féliciter un plan sans changer la loi internationale. Le droit n’obéit pas au communiqué de presse.”

Confondre appui politique et reconnaissance juridique revient à travestir le rôle du Conseil de sécurité.
Les résolutions onusiennes sont souvent des compromis de langage ; leur portée symbolique est forte, mais leur effet juridique reste limité tant que le peuple concerné n’a pas exprimé sa volonté.

Un texte qui «met en avant» l’autonomie comme base de négociation n’est pas une reconnaissance de souveraineté. Le Conseil produit souvent des formulations politiques (encourager «une solution basée sur l’autonomie», «encourager les propositions constructives», etc.) — cela oriente le processus, mais ne remplace pas les procédures juridiques d’un changement de statut. Il existe une grande différence entre préconiser/encourager le plan marocain comme cadre de discussions et reconnaitre la souveraineté marocaine sur le territoire

Conclusion : une prudence nécessaire

Le Maroc a le droit crié victoire pour son plan d’autonomie ; c’est une proposition politique qui cache une colonisation. Mais parler de “marocanité consacrée” avant même le vote relève d’un wishful thinking diplomatique.

Avant de proclamer une “victoire”, il faudrait rappeler :

  • que le processus onusien est toujours fondé sur l’autodétermination,
  • que le statut final du territoire n’a jamais été tranché,
  • et qu’aucune résolution du Conseil n’a jamais reconnu explicitement la souveraineté marocaine.

Le véritable test ne sera pas le vote du jour, mais la capacité du Conseil et du Secrétariat général à relancer un processus crédible de négociation directe entre les parties.

A/Kader Tahri / Chroniqueur engagé, observateur inquiet
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Sources
[1] Cour internationale de Justice, Western Sahara – Advisory Opinion, 16 octobre 1975.
[2] Le Monde Afrique, “Les États-Unis défendent à l’ONU l’autonomie sous souveraineté marocaine”, 29 octobre 2025.
[3] Security Council Report, “Western Sahara: Draft Resolution and Member Positions”, octobre 2025.

 

 

Oui, Monsieur Xavier Driencourt, j’ai lu et parcouru le rapport

L’article présenté comme « explosif » sur les accords franco-algériens de 1968 a suscité de nombreux échos, notamment au Maroc. Pourtant, à la lecture du rapport parlementaire qu’il prétend résumer, on découvre une tout autre réalité : un document budgétaire instrumentalisé à des fins idéologiques. Réponse à un récit biaisé qui confond expertise et stigmatisation.

Oui, Monsieur, j’ai lu et parcouru le rapport parlementaire dont vous parlez avec tant d’assurance et de superlatifs. Et c’est précisément parce que je l’ai lu que je m’étonne de la manière dont vous le présentez : sélective, approximative, et, osons le mot, idéologique. Vous en tirez des conclusions politiques qu’il ne contient pas, en le transformant en instrument de dénonciation plutôt qu’en base d’analyse.

Un rapport administratif devenu arme polémique

Le document en question, rédigé par les députés Charles Rodwell et Matthieu Lefebvre, relève d’un travail budgétaire de la Commission des finances. Il n’a ni vocation à juger de la politique migratoire française, ni à dresser un réquisitoire contre un peuple en particulier. Son objectif est strictement administratif : évaluer les implications financières et juridiques des accords bilatéraux, dont celui de 1968 conclu avec l’Algérie.

Vous en faites pourtant un « rapport explosif », un mot que vous répétez jusqu’à l’épuisement (Le mot « explosif » revient pas moins de six fois : une répétition volontaire qui cherche à dramatise le propos et à lui donner une dimension de scandale d’État.) comme s’il s’agissait d’une découverte subversive. En réalité, les auteurs du rapport eux-mêmes prennent soin de nuancer leurs propos et d’appeler à une révision concertée des dispositifs existants, non à une rupture unilatérale ni à une stigmatisation. Nulle part ils ne parlent de « privilèges », encore moins de « largesses accumulées ». Ces termes sont les vôtres, pas les leurs.

Des faits transformés en procès d’intention

Vous affirmez que « les Algériens bénéficient d’un dispositif exceptionnel et dérogatoire à toutes les étapes du parcours migratoire ». Ce raccourci spectaculaire ignore les bases historiques et juridiques de l’accord franco-algérien de 1968, signé dans un contexte postcolonial où la France reconnaissait les liens humains, économiques et sociaux hérités d’un siècle de cohabitation.

Cet accord n’a rien d’un privilège : il constitue un régime spécifique comparable à ceux existant avec d’autres États (Tunisie, Maroc, Sénégal), établi dans un cadre de réciprocité diplomatique. Les dérogations qu’il contient sont encadrées par le droit français et régulièrement adaptées aux réalités contemporaines.

Vous évoquez des chiffres – « 2 milliards d’euros par an » – sans préciser qu’il s’agit d’une estimation partielle, qui ne prend en compte ni les cotisations sociales, ni la contribution économique, ni les recettes fiscales générées par les travailleurs immigrés algériens. Ce déséquilibre méthodologique est d’ailleurs souligné dans le rapport lui-même.

En d’autres termes, vous transformez une question budgétaire complexe en argument identitaire, au service d’une narration binaire : la France paierait, les Algériens profiteraient.

Une indignation à sens unique

Votre texte se veut indigner par le « manque de transparence des administrations » et par la « dérive jurisprudentielle du Conseil d’État ». Ces reproches, adressés indistinctement aux fonctionnaires et aux juges, relèvent d’une méfiance généralisée à l’égard des institutions françaises elles-mêmes. Vous leur reprochez de respecter la loi, de garantir les droits fondamentaux, d’interpréter les textes en faveur de l’État de droit.

Vous omettez de rappeler que le Conseil d’État, loin d’être « hors sol », a précisément pour mission de veiller à la cohérence juridique entre les accords internationaux et le droit interne. S’il a parfois étendu les effets de l’accord de 1968, c’est dans le cadre de la hiérarchie des normes et des principes constitutionnels que la République française s’impose à elle-même.

Faire passer cela pour une « folie jurisprudentielle » relève moins de l’analyse que du slogan politique.

L’Algérie, cible commode d’un discours sur commande

Permettez-moi de vous retourner sur une note condescendante la formule : « Manifestement, il ne connaissait pas le sujet dont il parlait. »  Vous  n’avez pas lu le rapport dans son intégralité, ou qui avez choisi d’en retenir uniquement ce qui servait un propos préétabli.

Votre indignation, loin d’être spontanée, s’inscrit dans un discours médiatique désormais bien rodé : celui qui consiste à transformer chaque dossier technique impliquant l’Algérie en argument de tension bilatérale.

Et la reprise de votre texte par une certaine presse étrangère, notamment marocaine, confirme ce glissement. Loin d’informer, il nourrit une guerre narrative où le sujet n’est plus l’immigration, mais l’Algérie elle-même. Le journalisme cesse alors d’éclairer pour devenir un instrument diplomatique déguisé.

Lire avant d’accuser

Oui, Monsieur, j’ai lu le rapport. Et j’en retiens autre chose que des indignations à la chaîne :

  • la nécessité de réviser des accords anciens, sans céder à la caricature ni à la stigmatisation ;
  • la volonté des parlementaires de rétablir une transparence administrative, non de désigner des coupables nationaux ;
  • l’importance d’un débat serein sur l’avenir des liens franco-algériens, débarrassé des réflexes de l’époque coloniale et des simplifications électoralistes.

Il n’y a rien « d’explosif » dans un travail parlementaire. Ce qui l’est, en revanche, c’est la facilité avec laquelle certains s’en servent pour rallumer de vieilles rancunes. La polémique ne remplacera jamais la lecture.
Et dans un contexte international où la manipulation de l’opinion devient un outil politique, la rigueur intellectuelle reste notre meilleure défense.

A/Kader Tahri / Chroniqueur engagé, observateur inquiet
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Note de contexte : l’accord franco-algérien de 1968

Signé le 27 décembre 1968, cet accord bilatéral encadre les conditions d’entrée, de séjour, d’emploi et de protection sociale des ressortissants algériens en France.
Il repose sur la reconnaissance de liens historiques spécifiques entre les deux pays, hérités de la période coloniale. Modifié à plusieurs reprises (1985, 1994, 2001), il reste le principal cadre juridique des migrations algériennes en France.
Toute réforme ou dénonciation de cet accord suppose une négociation diplomatique bilatérale, et non une décision unilatérale.

Lien de l’article  d’un rapport devenu prétexte à polémique :

https://www.lefigaro.fr/vox/societe/xavier-driencourt-pourquoi-il-faut-lire-le-rapport-parlementaire-sur-l-immigration-algerienne-en-france-20251023

 

Dénoncer l’accord franco-algérien de 1968 : le droit bafoué au service d’une politique de l’hypocrisie

 

Pour dénoncer la volonté politique de rompre unilatéralement l’accord franco-algérien de 1968, une mesure contraire au droit international et inefficace sur le plan migratoire.
Elle met en lumière une instrumentalisation politique de la question migratoire et appelle à un dialogue renouvelé, respectueux de la mémoire et du droit.

Une dénonciation… qui aurait l’effet inverse

Ironie de l’histoire : si l’accord de 1968 venait à être dénoncé, les facilités de circulation prévues par les accords d’Évian de 1962 pourraient ressurgir.
Autrement dit, supprimer l’accord reviendrait à rétablir la liberté de circulation que ce texte avait précisément pour but d’encadrer.

Ce serait donc le comble de l’inefficacité : un geste présenté comme “ferme” qui, en réalité, ouvrirait davantage les frontières qu’il ne les fermerait.

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L’accord franco-algérien de 1968, bouc émissaire d’une dérive de l’extrême droite

L’Assemblée nationale a adopté, à une voix près, une proposition de résolution du Rassemblement national demandant la dénonciation de l’accord franco-algérien de 1968. Le RN s’en félicite, voyant dans ce vote une victoire idéologique ; mais au-delà de ce succès symbolique, c’est une autre réalité, bien plus préoccupante, qui se dessine : la banalisation des thèses de l’extrême droite et le brouillage des repères républicains dans le débat politique français.

Un texte juridiquement vide  

Rappelons-le : une résolution parlementaire ne lie pas le gouvernement. Elle exprime une opinion, rien de plus. En droit international, un traité bilatéral comme l’accord de 1968 ne peut être dénoncé qu’en cas de violation manifeste par l’une des parties. Or, les reproches adressés à l’Algérie – notamment son prétendu refus de reprendre ses ressortissants sous OQTF – ne reposent sur aucune clause du traité.
L’accord de 1968 ne traite ni des expulsions, ni des obligations de quitter le territoire français. L’argument juridique du RN s’effondre donc à la première lecture.

Ce vote n’aura aucune conséquence pratique, mais il marque un tournant : pour la première fois, une partie de la droite républicaine, y compris des élus du groupe Horizons, a choisi de voter avec le RN. La ligne de défense républicaine, construite depuis quarante ans pour contenir la rhétorique nationaliste, s’effrite sous nos yeux.

Un accord mal compris, instrumentalisé depuis cinquante ans

Il faut aussi rappeler ce qu’est réellement cet accord de 1968. Conclu dans un contexte post-colonial, il visait à encadrer l’immigration algérienne, non à la favoriser. Il mettait fin à la liberté totale de circulation héritée des accords d’Évian, et introduisait un régime de visas et d’autorisations de travail.

Trois avenants successifs (1985, 1994, 2001) et l’instauration du visa obligatoire en 1986 ont encore restreint les droits des ressortissants algériens. Ce texte, souvent présenté comme un “privilège migratoire”, est en réalité l’outil d’un contrôle renforcé, non d’un avantage.
C’est dire combien le débat actuel repose sur une méconnaissance historique alimentée par la démagogie.

Des “avantages” imaginaires

Les opposants à l’accord dénoncent régulièrement de prétendus “passe-droits” accordés aux Algériens : un visa de court séjour qui ouvrirait tous les droits, un statut de commerçant trop facile à obtenir, un regroupement familial plus souple.
La réalité administrative dément ces affirmations :

  • le visa de court séjour ne permet ni de s’installer ni de travailler ;
  • le statut de commerçant nécessite un visa long séjour et reste difficile à obtenir ;
  • le regroupement familial, certes accessible après douze mois au lieu de dix-huit, reste soumis à des conditions strictes de logement et de ressources.

Il est même des domaines où les Algériens sont désavantagés, comme celui des étudiants ou des travailleurs temporaires. Bref, l’accord ne confère pas des privilèges : il crée un régime particulier, aujourd’hui largement neutralisé par le droit commun des étrangers.

Un symptôme inquiétant du brouillage politique

Le plus préoccupant n’est pas le contenu du texte voté, mais la symbolique politique du scrutin. Que des députés issus de la droite modérée ou du centre aient pu voter une proposition du RN montre combien les frontières idéologiques se sont estompées.
Le front républicain, jadis ciment de la vie politique française, se délite dans l’indifférence générale.
Et le plus frappant est la démobilisation des autres groupes parlementaires : sur 92 députés du groupe présidentiel, seuls 30 étaient présents. Ce silence est un signal : la fatigue démocratique ouvre un espace au populisme.

La tentation du simplisme

Derrière la querelle sur un accord vieux de cinquante ans, se cache une autre bataille : celle du récit national. En s’attaquant à un texte symbolisant la relation franco-algérienne, certains cherchent à rejouer l’histoire coloniale sous les habits de la souveraineté retrouvée.
Mais réduire la diplomatie à un instrument électoral, c’est confondre fermeté politique et fermeture identitaire.
Ce glissement – qualifié à juste titre de “tentation trumpiste” – met en péril la rationalité juridique et le sens de l’État.

Conclusion

L’accord de 1968 n’est ni la cause des déséquilibres migratoires, ni un obstacle à la souveraineté française. Son maintien ou sa renégociation relève du dialogue diplomatique, non du réflexe idéologique.
La France a besoin d’un débat sur l’immigration, certes, mais fondé sur les faits, non sur les fantasmes.
À force de céder aux discours simplistes, la démocratie risque de perdre ce qui la distinguait : la primauté du raisonnement sur la peur, du droit sur le ressentiment

En somme, le vote du 30 octobre 2025 ne change rien en droit, mais il change beaucoup en symbole : il révèle une classe politique qui se détourne de la complexité au profit de slogans.
Face à la démagogie, il est urgent de rappeler que la République ne se défend pas par la peur, mais par la raison.

Rappelons-le : une résolution parlementaire ne lie pas le gouvernement. Elle exprime une opinion, rien de plus. En droit international, un traité bilatéral comme l’accord de 1968 ne peut être dénoncé qu’en cas de violation manifeste par l’une des parties. Or, les reproches adressés à l’Algérie – notamment son prétendu refus de reprendre ses ressortissants sous OQTF – ne reposent sur aucune clause du traité.
L’accord de 1968 ne traite ni des expulsions, ni des obligations de quitter le territoire français. L’argument juridique du RN s’effondre donc à la première lecture.

Ce vote n’aura aucune conséquence pratique, mais il marque un tournant : pour la première fois, une partie de la droite républicaine, y compris des élus du groupe Horizons, a choisi de voter avec le RN. La ligne de défense républicaine, construite depuis quarante ans pour contenir la rhétorique nationaliste, s’effrite sous les yeux des politiques français

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En France humiliée par le tribalisme accentuée au mythe de la communauté élue.

Sous couvert de défendre la République et la laïcité, certains discours d’extrême droite recyclent la peur de l’islam et des banlieues pour bâtir un récit de guerre culturelle. Mais la réalité du communautarisme français est bien plus complexe et ses angles morts, souvent révélateurs.

Y-a-t-il besoin d’en dire plus ?

En effet un grand tohu-bohu médiatique, pour cette hystérisation  qui vingt ans après les émeutes de 2005, une certaine presse d’extrême droite ressort la même grille de lecture : la France serait “recolonisée” par ses anciens colonisés, transformée en mosaïque de “tribus”.
Sous une apparence d’analyse, ce discours rejoue les vieilles obsessions : la peur du groupe, du clan, de l’étranger.

Partout où l’État recule, le clan avance”, écrit l’auteur de cette tribune anxiogène.
Mais ce “clan” n’est pas une catégorie sociologique — c’est une métaphore politique de l’ennemi intérieur.

Ce langage transforme des tensions sociales en conflit civilisationnel pour les milieux identitaires et les racistes de tous bords qui aboyaient fortement comme des loulous, des individus atteints d’une islamophobie aiguée, que pour en faire de l’immigration musulmane un ennemi au nom de la laïcité, dans un climat anxiogène, nourri par des amalgames et des discours haineux. Les mots ne décrivent plus : ils accusent. Ma présente tribune plaide pour une lucidité sans haine, une République sans peur, et une laïcité fidèle à son sens premier : l’unité dans la diversité.

Une fausse lucidité, un vrai culturalisme

Le texte attribue les violences et les fractures à un “tribalisme solidaire” hérité du Maghreb.
Tout devient affaire de culture : pauvreté, chômage, défiance, délinquance.
Ce qui relève des politiques publiques et de l’histoire sociale se trouve réduit à une essence ethnique.

Or, comme l’ont montré des chercheurs tels que Didier Fassin, François Dubet ou Olivier Roy, le communautarisme est souvent le symptôme d’une relégation, non la cause d’un désordre. Ce que ces auteurs appellent “tribalisme” est en réalité le produit d’une désaffiliation politique : l’État s’est retiré, la solidarité locale a pris le relais.

Une France “recolonisée” ? Le fantasme d’une inversion

Le récit du “Républi-clanisme” inverse la mémoire coloniale : la France ne serait plus coupable d’avoir dominé, mais victime d’être dominée.
Cette rhétorique inversée et victimaire légitime la peur identitaire tout en effaçant la complexité des héritages migratoires.

Derrière la peur du “tribalisme”, il y a souvent la peur de la mixité.
Et derrière la défense de la “République”, parfois, le refus du pluralisme.

Le deux poids deux mesures du communautarisme

L’un des biais majeurs de ce discours est sa sélectivité.
Il dénonce bruyamment le communautarisme musulman mais ignore d’autres réalités pourtant bien présentes.

En France, il existe des formes multiples de vie communautaire : juive, catholique,  Certaines s’expriment à travers des écoles confessionnelles, des associations religieuses ou des structures d’entraide. Elles répondent à des besoins différents : transmission de la foi, préservation culturelle, protection identitaire.

Le communautarisme juif, par exemple, se manifeste souvent dans un réseau éducatif dense où la transmission de la culture religieuse et linguistique occupe une place centrale.
Cet attachement, tout à fait légitime, peut toutefois favoriser un certain isolement éducatif et social.

La loi française de 1905 n’a pas empêché les privilèges communautaires accordés aux juifs et au Judaïsme comme religion reconnue, génératrice de communautarisme juif, et le germe est là. (Ecoles privés juives subventionnées par l’État, la cacherout alimentaire, les femmes de religion hébraïque ont bénéficié un temps réservés à leur usage aux piscines, les demandes de dispenses à l’examen, pour les jeunes accordées le samedi, jour du "chabbat", siège du Consistoire "beth din", une cour d'arbitrage rabbinique rendant ses jugements conformément à la "halakhah" la Charia juive, un ensemble de règles qui régis la vie juive au quotidien.).

À l’inverse, les écoles musulmanes, beaucoup moins nombreuses (une trentaine environ), demeurent sous forte surveillance administrative et peinent à trouver leur place.

Il y a  contradiction entre l’identité ethnique et la citoyenneté, ce qui est refusé à d'autres, est tout simplement toléré pour les juifs et surtout dans cette espèce d'engouement des milieux politiques et médiatiques pour tout ce qui concerne les juifs ?

La laïcité disposait en arrière-plan l’existence d’une communauté juive qui, de fait, n’hésite pas à se dire, tout simplement, française. Là encore, on joue avec les mots, on en emploie un pour un autre dans la volonté des Juifs de vivre dans une communauté qui ne respecte pas et qui s’en foute royalement des règles de la république, ce qui n’est le cas ni des musulmans ni des catholiques attachés à leurs origines religieuses.

Ces contrastes révèlent une réalité simple : la République accepte la pluralité, mais n’assume pas toujours la symétrie.
Elle tolère certaines expressions communautaires, en suspecte d’autres — souvent selon des critères politiques implicites.

La République trahie par ceux qui prétendent la défendre

La laïcité n’est pas l’arme d’un camp : elle est la règle commune.
Elle ne demande pas d’effacer les religions de l’espace public, mais d’empêcher qu’elles dictent la loi collective.

Ceux qui l’invoquent pour désigner un bouc émissaire en trahissent le sens.
Ils veulent imposer une laïcité d’exclusion, alors que la vraie laïcité est une liberté partagée.

Défendre la République, c’est refuser la hiérarchie entre les appartenances.
Ce n’est pas choisir entre catholiques, juifs ou musulmans : c’est refuser que quiconque se sente étranger chez lui.

La République, ou le courage de la nuance

Ceux qui dénoncent les “tribus” fabriquent eux-mêmes une tribu : celle de la peur.
Ils prétendent sauver la France, mais la réduisent à une identité figée.

Le véritable enjeu n’est pas d’interdire les appartenances, mais d’empêcher qu’elles deviennent des frontières. La République doit accepter les différences tout en garantissant la loi commune. Elle doit oser dire qu’il y a plusieurs formes de communautarisme, et que le problème n’est pas leur existence, mais leur instrumentalisation politique.

La laïcité, dans son sens le plus noble, ne combat pas la religion : elle combat le privilège.
Et c’est bien ce combat pour l’égalité, non celui contre la diversité, qui fonde notre pacte républicain.

Pourtant il est toujours dit que la laïcité a donné naissance à la nécessité de faire place à d’autres religions. Ce qui au départ était une bonne chose, Elle ne prévoit pas la disparition des religions de l’espace publique mais organise la neutralité religieuse de l’État, mais le judaïsme au réflexe communautariste a humilié la Laïcité.

Ce qui est moyenâgeux, c’est lorsque le fait communautaire implique un isolement dans des modes de vie, un repli sur soi dans des relations sociales, à hurler en permanence à l'antisémitisme, pour venir ensuite sangloter contre une certaine exclusion, après avoir tout fait pour s'affirmer différent, relève alors de la plus profonde hypocrisie, c'est à la fois dégueulasse et indigne, c’est dire que le communautarisme juif en prenant son fantasme pour la réalité, ne cesse de planifier de la revendication de droits religieux, des droits spécifiques qui priment sur les droits sociétales de toute un  pays afin de se préserver de toute influence.

A/Kader Tahri / Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »  
https://kadertahri.blogspot.com/