Une lecture anticoloniale et juridique
Mes grands-parents ont connu l’épreuve
de la colonisation française. Dépossédés de leurs terres, chassés de leurs
fermes, dépouillés de leurs troupeaux, ils ont résisté avec les moyens du bord,
avant d’être brutalement réduits au silence. Leur combat disait une chose
simple et universelle : aucun peuple colonisé n’accepte de bon gré la
soumission.
Aujourd’hui, l’histoire se répète sous
nos yeux, en Palestine. À longueur de plateaux télé et de dépêches officielles,
on qualifie le Hamas de « groupe terroriste ». Mais cette étiquette ne repose
sur aucun fondement du droit international. Elle relève d’une stratégie
politique et médiatique, destinée à masquer l’essentiel : la Palestine est un
pays occupé, et son peuple a le droit de résister.
Un cadre juridique clair : l’ONU n’a jamais classé le
Hamas comme terroriste
Contrairement à ce que répètent certains
gouvernements (États-Unis, Union européenne, Canada, Australie), l’Organisation
des Nations Unies n’a jamais inscrit le Hamas sur une liste de groupes
terroristes.
La raison est simple : depuis 1967,
Israël est reconnu comme une puissance occupante. La bande de Gaza, la
Cisjordanie et Jérusalem-Est sont soumis à une occupation militaire.
Or, selon le droit international
humanitaire – les Conventions de Genève, les résolutions de l’ONU et la
jurisprudence de la Cour pénale internationale – les peuples sous occupation
disposent d’un droit légitime à la résistance, y compris armée, tant que les
lois de la guerre sont respectées.
À ce titre, la résistance palestinienne
– sous toutes ses formes – relève davantage d’un mouvement de libération
nationale que du terrorisme. .
L’usage politique de l’étiquette « terroriste »
Pourquoi alors persister à qualifier le Hamas de terroriste
? Parce que cette qualification sert des objectifs précis :
- Étouffer le débat sur
l’occupation coloniale et la politique d’apartheid imposée aux
Palestiniens.
- Justifier les bombardements
massifs et le
siège inhumain de Gaza.
- Criminaliser toutes les formes
de résistance, même
pacifiques : ONG, journalistes, étudiants, militants.
Comme le rappelle la philosophe américaine Judith Butler, «
la résistance armée sous occupation ne peut être réduite au terrorisme
». Le cœur du problème, ce n’est pas le Hamas, mais bien l’occupation
elle-même. Aucune légitimité. Le gros mensonge, la
manipulation du public, commence là. Comme le rappelle Francesca Albanese,
juriste de l’ONU, le 6 septembre 2023, Gaza restait un territoire occupé au
regard du droit international. Le blocus est un acte de guerre. Les
Gazaouis avaient le droit de se défendre. Israël avait depuis 1967 et la
résolution 242, le devoir de se retirer de Gaza.
Une lutte dénaturée par l’islamisation de la
résistance
Historiquement, la cause palestinienne a d’abord été portée
par l’OLP, mouvement laïque et anticolonial. Mais Israël a laissé croître le
Hamas, islamisant la résistance afin de la transformer en guerre de religion.
Ce changement de narration a deux effets majeurs :
- Marginaliser les chrétiens
palestiniens, pourtant acteurs historiques de la résistance.
- Détourner l’attention du
problème central – la dépossession coloniale – pour le transformer en
conflit civilisationnel opposant « l’Occident » à « l’islam ».
Cette manipulation narrative permet de présenter la lutte
palestinienne comme un danger religieux, plutôt que comme ce qu’elle est
réellement : une lutte anticoloniale et universelle.
Un combat qui résonne avec toutes les luttes
anticoloniales
Ce qui se joue en Palestine n’est pas isolé. C’est le
prolongement des luttes qui ont marqué l’Afrique, l’Asie et l’Amérique latine
au XXe siècle : des peuples dominés se levant pour recouvrer leur souveraineté.
Tout comme les Algériens face à la France, les Vietnamiens
face aux États-Unis, ou encore les peuples d’Amérique latine face aux
dictatures, les Palestiniens portent une cause légitime et universelle.
L’ONU, faut-il le rappeler, n’a jamais reconnu Israël comme
puissance souveraine sur Gaza ou la Cisjordanie. Sans frontières définies, l’«
entité sioniste » reste dans une illégitimité juridique que les bombes ne
peuvent effacer.
Conclusion : remettre le problème au bon endroit
Qualifier le Hamas
de « groupe terroriste » est un abus de langage. C’est une arme de propagande
qui permet de délégitimer la résistance palestinienne, de masquer l’occupation
et de prolonger l’apartheid.
La vérité est plus
simple, et plus dérangeante pour certains :
- La Palestine est occupée
illégalement.
- Les Palestiniens ont le droit
naturel, juridique et universel de résister.
- Leur combat n’est pas religieux
: il est anticolonial.
Ce fut un choc
profond pour les personnes âgées, qui n'avaient pas appris à l'école qu'Israël
était un État colonial, et que le 7 octobre n'était que la réponse logique à
l'oppression coloniale. Ils n'avaient pas le mythe brisé devant les yeux, ni la
honte d'avoir accepté la tromperie.
Comme mes
grands-parents hier face à la colonisation, les Palestiniens aujourd’hui ne se
couchent pas devant l’injustice. Leur lutte est celle de tous les peuples qui
refusent l’asservissement.
Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme
ça. »
https://kadertahri.blogspot.com/

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