Un article royaliste, voulait donner une leçon de loyauté, mais la vraie
loyauté, c’est de dire la vérité, même quand elle dérange, publié récemment,
s’en est pris violemment au mouvement GenZ 212, accusant ses membres “d’insulter
la Nation” pour avoir adressé une lettre ouverte au Roi Mohammed VI. Sous
couvert de défendre le respect de la monarchie, ce texte révèle surtout une
vérité plus sombre, au ton royaliste et moralisateur, s’est permis de cracher
son mépris sur une jeunesse qui ose parler. Ce texte, dégoulinant de
condescendance, s’indigne qu’ils osent tout simplement exister
politiquement au Maroc, la jeunesse n’a plus le droit de parler, ni même de
rêver à un dialogue avec le pouvoir
Eh bien, oui : la jeunesse marocaine parle, et elle a raison de le
faire.
Parce que se taire, c’est mourir à petit feu.
Parce qu’au Maroc, des milliers de jeunes n’ont plus de voix, plus de travail,
plus de place dans la décision publique. Et parce qu’on ne construit pas une
Nation sur la peur, le silence et la soumission.
Et cela, c’est une honte nationale. Qu’on le comprenne une fois pour toutes : le
silence n’est pas le respect. La soumission n’est pas la loyauté et la critique
n’est pas la trahison. Parce qu’un Maroc qui refuse d’écouter sa jeunesse court
à sa perte et parce qu’un Roi fort ne craint jamais la parole libre de son
peuple.
La parole des jeunes n’est pas un crime
Dans un pays
qui se veut “en réforme”, exiger la transparence ou le visage découvert avant
d’écouter un message social est une hypocrisie. Quand la parole publique est
risquée, l’anonymat n’est pas une fuite, c’est une protection.
Combien ont été harcelés, arrêtés, voire emprisonnés pour un simple post, un
slogan, une pancarte ?
Alors, qu’on
ne vienne pas moraliser une génération qu’on a privée d’espace politique et de
perspectives.
L’anonymat des jeunes de GenZ 212 est une réponse à la peur, une peur
créée par un système qui n’aime la jeunesse que lorsqu’elle se tait, applaudit
ou sert d’image moderniste à l’étranger.
Que des
jeunes, souvent sans voix, osent rédiger un manifeste, même anonyme, est un
acte de courage, pas de trahison.
Quand les canaux institutionnels sont verrouillés, quand manifester expose à la
répression, quand chaque critique devient “atteinte à la stabilité du Royaume”,
parler devient un acte de résistance.
L’article
qu’on nous sert voudrait nous faire croire que la légitimité vient du cachet,
du tampon, du titre officiel.
Mais non : la légitimité naît du vécu, de la précarité, de l’exclusion,
de cette frustration que vivent des millions de jeunes Marocains oubliés par
les politiques publiques.
Et c’est précisément parce qu’ils aiment ce pays qu’ils refusent de s’y taire.
Un discours d’un autre siècle
Le texte
royaliste invoque “le respect”, “la loyauté”, “les traditions millénaires”.
Autant de mots destinés à fermer la bouche à une génération entière.
Mais derrière ces mots nobles, il y a une logique brutale : interdire toute
contestation.
On ne discute pas, on ne critique pas, on ne propose pas : on “fait confiance”.
Et si tu ne fais pas confiance, tu es suspect, “infiltré”, “manipulé par
l’étranger”.
Ce réflexe
de diabolisation est dangereux. Il infantilise tout un peuple, réduit les citoyens
à des sujets, et transforme la critique sociale en crime contre la patrie.
Aimer son pays, c’est vouloir le changer, pas le regarder s’enliser en silence.
Parler au
Roi ne devrait pas être un privilège réservé à une élite docile.
C’est un droit citoyen, un droit démocratique.
Ce discours
paternaliste prétend protéger la monarchie, mais en réalité il l’affaiblit, car
il la coupe de la jeunesse, de sa vitalité et de son avenir.
Un État fort ne craint pas la parole de sa jeunesse ; il l’écoute, il la
transforme en énergie politique.
Le paternalisme comme prison politique
Cette idée
que le peuple doit “faire confiance” et “laisser le Roi conduire” traduit une
vision profondément infantilisante du citoyen marocain. Cette vision du
Maroc, où le Roi guide et le peuple suit, appartient à un autre siècle.
On parle d’un “Royaume millénaire”, comme si la tradition justifiait la
stagnation.
Mais la jeunesse marocaine, elle, vit dans un monde nouveau : numérique,
globalisé, libre dans ses idées, et profondément consciente de ses droits.
Ce
paternalisme, cette manière de parler “pour” les jeunes sans jamais leur parler
“avec”, est une violence symbolique.
Il réduit le citoyen à un enfant qu’on gronde dès qu’il lève la tête.
Or, le Maroc d’aujourd’hui n’a pas besoin de pères, mais de partenaires dans
la construction démocratique.
On parle comme à des enfants qu’il faut gronder dès qu’ils osent questionner.
Mais la jeunesse marocaine n’est plus cette génération soumise aux discours
officiels : elle s’informe, elle s’organise, elle se réveille.
La monarchie
ne peut pas éternellement se présenter comme un père bienveillant face à des
enfants ingrats.
Le Maroc n’a pas besoin d’un tuteur. Il a besoin de citoyens libres,
conscients, et responsables.
Et cette maturité, c’est précisément ce que GenZ 212 incarne — même à travers
l’anonymat.
Anonymat ne veut pas dire lâcheté
Dans un contexte où la répression est réelle, l’anonymat est un outil de
survie politique, pas un masque de traîtres.
Les jeunes se cachent parce qu’ils savent que dire la vérité au Maroc coûte
cher : la convocation, le procès, l’humiliation médiatique.
Alors oui, ils signent “GenZ 212”, parce qu’ils savent que le système ne
protège pas la parole libre, il la punit.
Demander justice sociale, emploi, transparence politique, ou respect des
libertés n’est pas “insulter la Nation”. C’est l’aimer assez pour vouloir la
sauver.
Quand une génération ose écrire au Roi, ce n’est pas un manque de respect, c’est
un cri de détresse, un geste de foi dans la possibilité du dialogue.
Mais la
réponse qu’on lui renvoie, c’est la répression, le dénigrement, la diffamation.
On traite des jeunes Marocains comme des ennemis, simplement parce qu’ils
refusent de rester spectateurs.
Voilà la vraie imposture : celle d’un système qui se dit réformiste mais
méprise la parole populaire.
Ceux qui
dénoncent leur anonymat devraient d’abord dénoncer le climat de peur qui
le rend nécessaire.
Revendiquer, ce n’est pas trahir
Le texte
royaliste accuse les jeunes de “vouloir semer le chaos”.
Mais le vrai chaos, c’est l’injustice.
C’est de voir une génération diplômée, compétente, lucide, condamnée au chômage
et au mépris politique.
C’est de transformer des citoyens en spectateurs d’un théâtre où tout est
décidé d’avance.
Demander des
comptes au pouvoir, ce n’est pas le renverser, c’est lui rappeler ses promesses.
Et si la jeunesse écrit au Roi, c’est parce qu’elle croit encore, quelque part,
que sa voix peut être entendue.
Ce n’est pas de la rébellion, c’est de l’espérance.
Écoutez la jeunesse, pas les courtisans
La génération GenZ212 ne demande ni privilèges ni médailles.
Elle demande d’exister, d’être reconnue, d’avoir le droit de participer à la
construction du pays.
Elle ne veut pas casser le Maroc, elle veut le réveiller.
La jeunesse GenZ212 marocaine n’est ni manipulée ni naïve.
Elle voit, comprend et exige, parce qu’elle aime ce pays, justement.
Et si elle doit parler derrière un écran, c’est parce qu’on lui a fermé la rue,
les syndicats, les médias, les partis.
Il n’y a pas
de démocratie sans voix multiples.
Il n’y a pas de stabilité sans justice sociale.
Et il n’y a pas de Roi fort sans citoyens libres.
Le Maroc de
demain ne se construira pas à coups de sermons royalistes, mais à coups de dialogues
sincères, de courage politique et de respect mutuel.
Que le
pouvoir entende ceci clairement :
On ne sauve pas un pays en faisant taire sa jeunesse.
On le sauve en l’écoutant.
Ceux qui
traitent ces jeunes de “voyous masqués” ou d’“agents étrangers” devraient se
demander :
qui sont les vrais ennemis du pays ?
Ceux qui réclament dignité et justice, ou ceux qui veulent que rien ne change ?
Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient
comme ça. »
https://kadertahri.blogspot.com/





