Parfois il m'est utile de le dire !

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La mauvaise chapelle médiatique : quand les mots protègent le pouvoir

 

Face à la tragédie palestinienne, la presse dominante continue de réciter son catéchisme moral et géopolitique. Les “fact-checkers” vérifient les marges mais jamais les fondements. On ne questionne pas la colonisation, on la reformule. Derrière la neutralité revendiquée, c’est une guerre du langage qui s’exerce et les Palestiniens en paient le prix.

La presse dominante n’a plus besoin de censure : elle s’en charge elle-même. Les rédactions ne manquent pas de moyens, mais d’audace. De l’aube au soir, on “vérifie”, on “contextualise”, on “neutralise, autant de mots pour dire qu’on détourne le regard. Le rôle du journalisme n’est plus d’informer, mais de rassurer le lecteur que rien d’essentiel ne change.

Quand il s’agit d’Israël et de la Palestine, le lexique dit tout : “affrontements” au lieu de bombardements, “ripostes” au lieu de massacres, “conflit” pour ne pas dire colonisation. La presse a troqué la précision contre la prudence. Elle ne nomme plus, elle blanchit. Et quand quelqu’un ose rappeler le droit, l’histoire ou simplement la vérité, la machine morale se met en branle : “radical”, “antisémite”, “complotiste”. L’étiquette tient lieu de réfutation.

Ce conformisme a ses gardiens : les fact-checkers, ces nouveaux inquisiteurs de la pensée. Leur mission affichée la vérité s’arrête toujours au seuil du pouvoir. On corrige une citation, jamais une politique. On recadre une émotion, jamais une injustice. Leur zèle sélectif devient un outil idéologique : ils servent de tampon entre l’opinion publique et le réel.

Pendant ce temps, la population palestinienne s’enfonce dans un désespoir sans nom, et les médias occidentaux s’enferment dans leurs studios pour débattre du “niveau de proportionnalité” des bombardements. L’indécence est devenue méthode.

La “chapelle médiatique” occidentale si prompte à donner des leçons de démocratie, tremble dès qu’il faut questionner ses propres alliances symboliques. Elle s’abrite derrière la morale pour éviter la politique. Et quand la vérité heurte l’allié occidental, elle préfère le silence.

Mais un système d’information qui ne tolère que la version des puissants ne fait pas du journalisme : il fabrique du consentement. Le pluralisme n’est pas une menace. C’est sa disparition qui en est une.

Le pire, c’est cette certitude satisfaite des fact-checkers, ces nouveaux gardiens du temple médiatique, qui prétendent traquer la désinformation tout en confortant le mensonge d’État. Ils “corrigent” les marges, mais jamais le centre. Ils ne débattent pas : ils sanctifient. Leur zèle à défendre l’ordre symbolique remplace toute recherche de vérité.

Et gare à celui ou celle qui s’écarte du script : les étiquettes tombent aussitôt. “Radical”, “antisémite”, “pro-Hamas”. Peu importe la rigueur, peu importe le droit international : on ne conteste pas l’orthodoxie de la narration occidentale. Le débat devient une police de la pensée, et la pensée, un champ miné.

Pendant que les éditorialistes s’interrogent sur la “proportionnalité” des bombardements, Gaza s’effondre. Des milliers de civils sont enterrés sous les décombres, pendant qu’en Europe on débat du ton à adopter. L’indécence devient méthode, la prudence devient complicité.

Je ne parle pas ici de haine, mais de responsabilité. De cette lâcheté collective qui consiste à maquiller la violence derrière le langage. Car dans cette guerre, les mots ne sont pas neutres : ils choisissent un camp. Dire “terroriste” ou dire “résistant”, ce n’est pas une nuance, c’est un verdict.

Les rédactions qui se drapent dans leur morale progressiste refusent d’admettre qu’elles participent à la fabrication du consentement. Ce qu’elles appellent “objectivité” n’est souvent que la défense du statu quo. Et tant qu’elles s’en tiendront à cette neutralité mensongère, elles seront, qu’elles le veuillent ou non, du côté du pouvoir pas de la vérité.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »


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