Le débat sur l’immigration en France est aujourd’hui traversé par une forte charge émotionnelle. Certains médias et tribunes engagées, particulièrement proches de l’extrême droite, construisent un récit alarmiste où l’immigration serait à l’origine de l’ensemble des difficultés sociales, économiques ou culturelles du pays. Un exemple récent illustre ce glissement : un texte virulent dénonçant la politique étrangère française, les coopérations culturelles avec l’Afrique, et prêtant à l’immigration des intentions hostiles, voire destructrices. Mais ce type de discours ne cherche pas à éclairer : il vise à inquiéter, à diviser et à désigner des ennemis intérieurs.
Un discours qui ne repose pas sur des faits mais sur
des émotions
Ce type de
texte utilise plusieurs procédés rhétoriques bien identifiés :
Généralisation
abusive : quelques
comportements d’individus sont étendus à des millions de personnes.
Amalgame
identitaire :
immigration = islam = délinquance = menace civilisationnelle.
Sélection
orientée d’exemples : on ne
retient que des cas négatifs pour créer une impression de danger.
Absence de
données vérifiables : jamais de
chiffres complets, jamais de sources neutres.
L’objectif n’est pas de débattre de politique migratoire, mais de fabriquer un récit d’invasion et de chaos qui entretienne la peur.
Ce que montrent réellement les données sur
l’immigration
Contrairement
à ce que ces discours laissent entendre :
90% des
titres de séjour délivrés en France sont légaux (études, travail, regroupement
familial, asile).
La majorité
des immigrés travaille, cotise et contribue à l’économie.
80% des
migrations africaines restent sur le continent africain : il n’y a pas « d’invasion ».
Les enquêtes
sociologiques (INED, CNRS) montrent que la grande majorité des Français
musulmans adhère aux lois de la République.
Reconnaître
ces réalités ne signifie pas nier les difficultés. Il existe des enjeux
d’intégration, de logement, de ségrégation urbaine, de discriminations. Mais la
simplification brutale « immigration = problème » empêche de les résoudre.
Une vision erronée de l’identité française
On lit
souvent que la France se « dissoudrait » au contact d’autres cultures. C’est
oublier une évidence historique :
La France s’est toujours construite par apports successifs.
Romains,
Gaulois, Celtes, Francs,
Apports
méditerranéens, caraïbes, africains, asiatiques…
Christianisme,
laïcité républicaine, Lumières…
La France
est une nation qui intègre, transforme et crée, pas une forteresse qui se
fige.
Dire que la France a une part d’africanité n’est pas une provocation : c’est
une réalité historique, linguistique, culturelle et humaine.
Le vrai risque n’est pas l’immigration, mais la
fragmentation politique
La société
française ne souffre pas d’un excès d’altérité, mais d’un excès de méfiance.
La fracture ne vient pas de la diversité, mais du refus de la reconnaître
comme fait social durable.
Plus on entretient l’idée d’un « eux contre nous », plus on fabrique précisément ce que l’on prétend craindre : des sociétés parallèles, de l’incompréhension, de la défiance.
Ce dont la
France a besoin, ce n’est pas d’un ennemi intérieur, mais : d’une politique
migratoire claire et transparente, d’une lutte résolue contre les
discriminations, d’un projet d’intégration ambitieux, d’un langage
public responsable et apaisé
Conclusion : choisir l’intelligence politique plutôt
que la peur
Critiquer
une politique migratoire est légitime. Instrumentaliser des populations
entières ne l’est pas.
La France ne
gagnera rien à se replier sur elle-même, à s’enfermer dans la défiance ou à
essentialiser des millions de citoyens ou de résidents.
Elle ne cessera d’être la France que le jour où elle renoncera à son idéal
universaliste, à sa capacité à intégrer, à sa foi dans l’intelligence
collective.
L’immigration
n’est pas la cause de leurs fractures. C’est leur manière d’en parler qui peut
en créer — ou les apaiser.
A/Kader Tahri / Chroniqueur engagé,
observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient
comme ça. » https://kadertahri.blogspot.com/
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