À les
entendre, dans l’espace médiatique du Makhzen, la question du Sahara
occidental demeure l’un des sujets les plus chargés symboliquement,
politiquement et historiquement. Elle cristallise passions, identités et
représentations de souveraineté. Un dernier argument de propagande
est désormais propagé avec force : Le Maroc constituerait par une
autonomie verticale avec son Sahara marocain.
L’autre
argument de propagande répété ad nauseam par les
cajoleurs du Makhzen consiste à dire que le Sahara Occidental, tout bien pesé,
n’existerait pas, né d’un mythe fondateur. Qu’il serait depuis toujours une
terre Marocaine.
Mais au-delà
des émotions, il existe une réalité juridique et diplomatique qui ne devrait ni
être ignorée, ni instrumentalisée.
Or, on observe aujourd’hui, dans une partie significative de la presse
marocaine, une tendance à affirmer que les Nations unies auraient désormais adopté
le plan d’autonomie proposé par le Maroc comme unique cadre de règlement.
Cette affirmation se répand, se répète, s’enracine – mais elle ne correspond
pas aux textes.
Il est donc
important de rappeler ce que disent réellement les résolutions du Conseil de
sécurité, c’est-à-dire le seul cadre reconnu par la communauté
internationale. Ce sont toujours les mêmes qui font aujourd’hui mine de croire
que le Roi du Maroc pourrait respecter le droit international. L’expérience
nous enseigne qu’aucun dictateur, saisi par l’hubris, par l’ivresse d’un
pouvoir sans limite, n’est à l’abri de décisions défiant la raison. Ce vertige
a conduit Hassan 2 avec sa marche verte jusqu’au Sahara Occidental 1971 pour un
faire son bien. Je ne me souviens pas que les causes du conflit aient été expliquées
autrement que par le désir agressif de conquête du Roi
Le langage du Conseil de sécurité : le cœur du dossier
Depuis plus
de quinze ans, les résolutions du Conseil de sécurité du maintien de la paix au
Sahara ont adopté une formule désormais stable.
La résolution 2703 (30 octobre 2024), comme celles qui l’ont précédée (2602,
2654, 2685), affirme :
« Le
Conseil de sécurité réaffirme la nécessité d’une solution politique réaliste,
pragmatique et durable, mutuellement acceptable, fondée sur le compromis. »
Cette phrase
est centrale. Elle constitue le cadrage diplomatique du conflit. Elle signifie
trois choses essentielles : Aucune solution ne peut être imposée
unilatéralement. Aucune solution n’est considérée comme acquise. Le résultat
final doit être négocié.
En d’autres termes, l’ONU n’a pas tranché et ne déclare pas que le Sahara a été ou serai marocain. Elle ne déclare pas non plus qu’il doit devenir indépendant c’est au peuple Sahraoui d’en décider) Elle demande un processus, pas un verdict.
La reconnaissance du plan d’autonomie : une
appréciation diplomatique, pas une validation juridique Les résolutions saluent
la proposition marocaine : « Le Conseil de sécurité prend note des efforts
sérieux et crédibles du Maroc. »
Cette
formule signifie que le Maroc : a présenté une proposition solide, cohérente et
compatible avec l'idée de compromis. Cela n’a rien d’anodin. Mais cela ne
signifie pas que : le plan d’autonomie est la seule base de négociation, que
l’indépendance est exclue par principe, ou que l’ONU adopte la vision marocaine
du conflit.
Dire le
contraire, comme le font certains éditorialistes, revient à passer de la
reconnaissance de la valeur d’une proposition à l’affirmation de sa supériorité
exclusive.
C’est un glissement politique, pas juridiquement fondé.
Le
référendum : toujours inscrit, Il est
essentiel de rappeler que le référendum d’autodétermination n’a jamais été
supprimé du cadre onusien.
Il demeure une option, théoriquement ouverte.
Mais dans
les faits, l’ONU elle-même a constaté son impossibilité opérationnelle, en
raison du blocage technique, non tranchable, qui a conduit l’ONU à substituer
la logique du vote à celle de la négociation politique.
Ainsi : L’indépendance
n’est pas juridiquement abandonnée, mais n’est plus le scénario opérationnel
privilégié à ce stade.
La question du rôle de l’Algérie
Un élément
évolue néanmoins dans le discours onusien récent : la mention explicite des quatre
parties. Les résolutions ne parlent plus seulement de « deux parties », mais : «
Le Maroc, le Front Polisario, l’Algérie et la Mauritanie. »
L’Algérie
n’est donc plus considérée comme simple « pays voisin », mais comme un
acteur nécessaire du processus politique. Cela ne veut pas dire : qu’elle doit
accepter l’autonomie, ni qu’elle endosse le rôle de belligérant.
Cela veut
dire : qu’aucune solution durable ne peut être trouvée sans l’Algérie. Reconnaître
cela relève du réalisme, non de la concession.
Le danger du triomphalisme discursif
Que certains États soutiennent la proposition
marocaine, notamment plusieurs pays africains, arabes et européens, est un
fait.
Que la dynamique diplomatique évolue dans le sens d’une solution négociée
plutôt qu’un référendum binaire est également un fait.
Mais
transformer ces tendances en victoire définitive est un raccourci dangereux.
Pourquoi ? Parce
que : Une position exagérée est aisément démontée. La crédibilité se construit
sur l’exactitude, pas sur l’affirmation. La diplomatie se joue dans la nuance,
jamais dans le slogan.
Le conflit
du Sahara souffre déjà suffisamment de la surinterprétation, de la communication
identitaire et de la simplification stratégique. L’heure n’est pas au spectacle
politique, mais au travail patient et lucide.
Conclusion
Le Conseil
de sécurité n’a ni tranché en faveur de l’autonomie, ni maintenu la centralité
du référendum : il a installé la recherche du compromis comme seule voie
crédible.
Cela
implique : écouter, négocier, reconnaître les contraintes de l’autre.
Il me semble
que la presse du Makhzen est appelée à faire la politique internationale, pas
du récit national. La paix, la stabilité et la coopération maghrébine méritent
mieux que des certitudes proclamées cela demande une maîtrise du langage
diplomatique, le respect du cadre juridique, et une honnêteté intellectuelle
face aux faits. Sans cela, le conflit continuera moins parce qu’il est
insoluble que parce qu’il est mal raconté.
Une même
fuite en avant s’observe au Maroc dans le camp royaliste. C’est un fait :
le Makhzen ne sait plus argumenter autrement que par le mépris, l’injure, la
diabolisation. Ce manichéisme bas de gamme est également utilisé par une partie
de la politique Il suffit d’entendre les
arguments anti-Algérie rudimentaires Bourita ou de Omar Hilale pour s’en convaincre.
A leur décharge, les courtisans du royaume qui ont une très
forte impression qu'ils contribuent pour beaucoup dans le cout politique du
Makhzen. Un peu comme pense le Français moyen avec le cout social de
l'immigration! A chacun son ressentiment.
A/Kader
Tahri / Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient
comme ça. » https://kadertahri.blogspot.com/

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