Rif : mémoire d’un peuple debout, face au silence du Makhzen
Il y a dans
les montagnes du Rif une mémoire que nul pouvoir central n’a réussi à effacer.
Une mémoire rebelle, forgée dans la résistance contre l’occupation, contre
l’autoritarisme, et contre l’effacement politique. Une mémoire qui dit : dignité,
justice, liberté.
C’est cette mémoire qui a donné naissance, en 1923, à la République du Rif,
sous la direction de l’émir Abdelkrim El Khattabi — première tentative moderne
d’autodétermination dans le Maghreb. Elle fut écrasée par les puissances
coloniales, avec la complicité du Makhzen. Mais elle n’a jamais cessé d’exister
dans les consciences.
Aujourd’hui,
le Rif n’a pas oublié.
Un peuple
marginalisé dans son propre pays
Depuis
l’indépendance, la région du Rif est traitée non comme une composante du pays,
mais comme un sujet à surveiller.
Les investissements y sont faibles, l’accès aux infrastructures limité, le
chômage massif, l’émigration presque une nécessité.
Dans les villages de l’arrière-pays, l’école manque, l’hôpital manque, l’avenir
manque.
Et lorsque
les jeunes demandent simplement d’être traités comme des citoyens, on
leur répond par les tribunaux, la prison ou l’exil forcé.
Le Hirak n’était pas une révolte : c’était un verdict C’était
pour réclamer la vie. C’était un cri de dignité pour des hôpitaux, pour
des universités, pour le droit de vivre et de rester chez soi
Ce cri a été
accueilli par le silence, puis par la répression. Le droit de ne pas mourir
écrasé dans un camion à bennes et l’État a répondu par : les arrestations, les
procès politiques, les peines interminables.
Ce cri a été
accueilli par le silence, puis par la répression Des dizaines de jeunes
croupissent encore en prison pour avoir demandé la dignité. Voilà la
vérité.
Amazigh :
l’homme libre
Les Rifains
ne demandent pas des privilèges. Ils demandent la reconnaissance de ce qu’ils
sont : un peuple amazigh, héritier d’une histoire anticoloniale, porteur d’une
vision de justice et d’égalité. Dire Amazigh, ce n’est pas un slogan
identitaire.
C’est affirmer le principe fondateur de toute société moderne :
un peuple ne peut vivre digne que lorsqu’il participe à décider de son destin.
Ce qui se joue dépasse le Rif
Les crises
sociales qui frappent le Maroc aujourd’hui — chômage massif, inégalités
extrêmes, corruption, fuite de la jeunesse — ne sont pas des problèmes
régionaux.
Elles révèlent une fracture nationale profonde.
Le Rif n’est
pas en marge :
il est le miroir où se reflètent les contradictions du pays.
Et tant que
la question du Rif restera traitée comme un dossier sécuritaire, tant que la
parole populaire sera considérée comme une menace, tant que l’histoire
d’Abdelkrim sera tue,
le Maroc restera avec une partie de lui-même brisée.
Pour une justice historique et politique
Il est temps
: de reconnaître officiellement la République du Rif comme chapitre
fondateur de l’histoire moderne du Maghreb, de libérer les prisonniers du
Hirak, symbole d’une jeunesse refusant l’humiliation, de mettre fin à la
marginalisation structurelle de la région, d’ouvrir enfin un dialogue
politique national authentique sur la décentralisation, l’égalité
territoriale, la dignité économique.
Parce
qu’aucune construction politique durable ne peut s’appuyer sur le silence, la
peur ou l’oubli.
Conclusion : le Rif est debout
Le Rif
n’attend pas d’être sauvé. Le Rif n’attend pas la permission d’exister. Le Rif
ne demande qu’une chose : la reconnaissance de sa place dans une histoire qu’il
a contribué à construire. Le Rif ne se taira pas. Parce que le silence, c’est
déjà une tombe.
Et ce peuple-là n’est pas né pour être enterré. Ce peuple porte la
mémoire.
Ce peuple porte la dignité.
Ce peuple porte la preuve qu’un autre avenir est possible. Et il continuera.
Jusqu’à ce que justice soit faite. La dignité d’un peuple n’est pas une revendication. C’est
un droit. Et c’est ce droit que le Rif continue de défendre, debout.
A/Kader
Tahri / Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient
comme ça. » https://kadertahri.blogspot.com/
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