Le 31
octobre 2025, l’ONU aurait, selon la communication officielle, « consacré la
vision marocaine » dans le dossier du Sahara. Une victoire diplomatique,
nous dit-on, une leçon de leadership. Mais derrière l’enthousiasme, se cache
une réalité plus inquiétante : le Maroc se raconte comme une légende et se
regarde dans un miroir sans taches.
La grandeur proclamée devient un écran, et le patriotisme, un instrument de
docilité.
On nous dit que le Maroc est une école de leadership.
Soit. Mais quelle école célèbre la parole unique, la pensée alignée, la
victoire sans débat ?
On nous parle de vision, de destin, de momentum ; on oublie la sueur des
invisibles, la colère des exclus, le silence imposé à ceux qui osent
questionner la « cause sacrée ».
Ce n’est pas une école de leadership, c’est une cathédrale de courtisans.
Le Maroc mérite mieux que la mise en scène de sa propre gloire : il mérite la
vérité, la justice, et la liberté d’écrire son avenir autrement qu’en hymne au
trône.
Au citoyen,
on lui intime de célébrer un « leadership
à ciel ouvert », il suffit de proclamer la grandeur pour qu’elle
devienne vérité officielle. Il suffit d’un vote à l’ONU pour effacer cinquante
ans d’ambiguïté politique. Il suffit d’une plume inspirée pour transformer la
politique en religion, la monarchie en prophétie, et la nation en procession
d’admirateurs.
La presse
sert un pays triomphant, un Royaume debout, une « vision »
qui illumine les consciences du nord au sud… en oubliant de préciser que seul
le Roi dispose des lunettes pour la contempler. Car ce leadership qu’on
glorifie tant n’est pas une école : c’est un catéchisme. Et les citoyens
marocains seraient des mauvais élèves s’ils
osaient lire autre chose que le manuel sacré.
Patriotisme ou loyalisme ?
Depuis ce
fameux vote, un parfum d’auto-congratulation flotte sur le Royaume.
Les tribunes s’enchaînent, les mots se répètent : vision, constance, foi,
destin. Le Maroc, dit-on, serait devenu une « école de leadership à
ciel ouvert ».
Mais à y
regarder de près, cette célébration tient davantage de la liturgie que du
débat.
Le leadership vanté n’est pas un partage de pouvoir, c’est une verticalité
absolue.
Un récit mythologique où le Roi incarne la clairvoyance, le peuple la ferveur,
et l’histoire une marche triomphale vers la reconnaissance universelle.
Cette
glorification n’enseigne rien : elle anesthésie. Elle transforme la politique
en religion d’État, où contester revient à blasphémer.
Le sujet de
la presse nous explique que l’Histoire n’a qu’une trajectoire, une marche —
verte, forcément verte — tracée par les monarques éclairés. Les peuples
marchent, eux ne font qu’obéir. L’unité nationale devient soumission, le devoir
se confond avec la déférence. Au Maroc, aimer son pays revient à aimer son Roi
— ne pas confondre, malheureux !
Mais le patriotisme
n’est pas une liturgie. Il n’est pas dans les défilés, ni dans les grands
discours de victoire. Il est dans la capacité à douter, à interpeller,
à corriger. Or ici, douter est une faute. Interroger est une menace. Et
corriger un crime. Ce pays n’a pas besoin d’apôtres du leadership : il a besoin
de citoyens.
Le leadership véritable commence où s’arrête la mise
en scène
Quelle
étrangeté que ce mot, « leadership », ressassé trois fois par
paragraphe jusqu’à en perdre toute substance. Peut-être veut-on nous faire
oublier ce qu’il implique vraiment : responsabilité, recevabilité, transparence
— bref, tout ce que ce texte esquive avec soin.
Le mot « leadership
» est devenu le totem de la rhétorique royale. On le répète à l’infini comme
pour conjurer l’absence de participation réelle. Mais que vaut un leadership
sans démocratie ?
Un leadership sans responsabilité, sans transparence, sans critique ?
Les grandes
décisions descendent du sommet, les félicitations remontent du bas.
La machine fonctionne à merveille : chacun connaît son rôle, personne ne pose
de questions.
Pendant qu’on s’enorgueillit des victoires diplomatiques,
les journalistes sont incarcérés (Il me suffit de dire que le Plus
vieux détenu politique de la planète est marocain, Me Ziane 83 ans.) les
enseignants manifestent, les jeunes diplômés fuient le pays et les régions
entières attendent encore d’être écoutées.
Ce n’est pas
du leadership : c’est de l’illusionnisme politique dans une époque qui est à la
mise en scène. Le Maroc ne gouverne plus : il communique.
Chaque événement devient un momentum, chaque projet une « vision
royale », chaque succès sportif une preuve de génie national. Mais cette
communication permanente a un coût : celui de la vérité. Les fractures
sociales, le chômage endémique, les inégalités régionales, la pauvreté
silencieuse — tout cela disparaît sous le vernis du storytelling
national. La politique s’efface derrière le marketing. Et le citoyen, lui,
devient un consommateur d’illusions patriotiques.
Le triomphe des courtisans
Le Palais officiel
parle d’une « dream team royale ».
Tout est dit : nous ne sommes plus dans une communauté politique, mais dans une
cour.
Le Maroc n’est plus une agora : c’est une loge d’admiration. Les courtisans se
succèdent à la télévision pour tresser lauriers et hyperboles.
Le courage intellectuel, lui, se tait ou s’exile. Et dans ce vacarme de
louanges, le peuple devient spectateur d’une grandeur qu’il ne ressent plus. Une
nation sans contradiction est une nation qui se prive de vitalité. Le
pluralisme n’est pas un luxe : c’est un acte de santé publique.
Le Maroc des marges : le seul leadership qui vaille
Heureusement,
un autre Maroc existe — hors du champ des caméras. Celui des travailleurs
précaires, des enseignants en lutte, des jeunes qui inventent sans moyens, des
associations locales qui résistent à l’asphyxie bureaucratique.
Un Maroc invisible mais vivant, indocile, créatif. C’est là que se construit le
leadership réel :
dans la désobéissance constructive, la pensée libre, la dignité quotidienne.
Pas dans les discours calibrés ni les communiqués d’autosatisfactions.
Quel est le
problème si la décision revient, en fin de compte, au référendum. C’est aux
sahraoui de choisir entre indépendance et autonomie.
Le Maroc n’a rien gagné ici. Inscrire l’autonomie
comme une « option » de vote pour les sahraoui n’a rien
d’une victoire pour le Maroc. Bien au contraire, il s’agit plutôt d’une
propagande pour masquer un échec, car le makhzen voulait inscrire « l’autonomie »
comme seule et unique option.
L’autodétermination reste donc la solution
intangible.
Alors que
l’on cesse de vendre aux Marocains une grandeur importée par communiqué
diplomatique. Que l’on accepte enfin que le Maroc a besoin de débats, de
pluralisme, de liberté. Que la fierté
nationale ne soit plus synonyme d’allégeance.
Car le
véritable leadership marocain n’appartient pas aux monarques — il appartient à
ceux qui refusent d’être spectateurs de leur propre histoire.
En répétant, sous des formes pseudo-journalistiques,
les mêmes narrations négatives, ces médias finissent par façonner un imaginaire
collectif où l’Algérie serait un acteur du passé, et le Maroc, un modèle
d’avenir.
Cette mécanique, typique de la guerre informationnelle moderne, repose moins
sur le mensonge direct que sur la distorsion du réel, la dramatisation et la
répétition. On sait de nos voisins du Maroc, c'est toute leur
culture historique qui s'exprime ainsi et tous les sous-entendus de leur
stratégie du chaos et leur idéologie monarchiste... Ce n'est pas brillant, bien
que la bêtise soit inouïe, la boucle du Roi est bouclée. !
A/Kader
Tahri / Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient
comme ça. » https://kadertahri.blogspot.com/

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire