Dans une Gaza dévastée
par des mois de bombardements, la récupération des corps israéliens comme
palestiniens se heurte à une réalité
matérielle et humaine insurmontable. Accuser le Hamas d’inaction revient à nier
l’ampleur de la destruction causée par Israël.
Alors que le cessez-le-feu entre Israël et le Hamas entre dans sa deuxième
semaine, Tel Aviv multiplie les pressions pour récupérer les corps de
prisonniers israéliens disparus à Gaza. Mais sur le terrain, où la majorité des
infrastructures sont à terre, où les secours creusent à mains nues, cette
exigence sonne comme une injonction impossible. Derrière ce débat se cache une
question plus profonde : celle du deuil sélectif et de la hiérarchie des
souffrances.
Une indignation à
géométrie variable
Le monde s’émeut, à juste titre, du sort des familles israéliennes toujours
sans nouvelles de leurs proches.
Mais dans le même temps, plus de 9 000 Palestiniens demeurent portés
disparus sous les ruines, souvent sans nom, sans tombe, sans image.
Ce contraste interroge : pourquoi la compassion internationale semble-t-elle
s’arrêter aux frontières du blocus ?
« Les médias comptent les otages israéliens, mais plus personne ne compte
les morts palestiniens. »
— Témoignage d’un secouriste de Khan Younès
Gaza, une tombe à ciel
ouvert
Depuis le 7 octobre 2023, les bombardements israéliens ont fait de
Gaza un paysage lunaire.
Selon le ministère de la Santé local :
- 70 000
morts,
- 170 000
blessés,
- des
milliers de disparus sous les décombres.
Les secouristes manquent d’engins lourds, de carburant, d’équipements de
sécurité. Beaucoup creusent littéralement à mains nues. Les morgues sont
pleines, les hôpitaux détruits, les routes impraticables.
Dans ces conditions, même la récupération des corps palestiniens devient un
défi héroïque — alors comment reprocher au Hamas de ne pas retrouver tous les
corps israéliens
Ce que la guerre a
enseveli
Cinq obstacles majeurs rendent la restitution des corps israéliens quasi
impossible :
- Destruction
massive : des captifs ont été ensevelis sous des tonnes de gravats,
conséquence directe des frappes israéliennes.
- Accès
restreint : la moitié du territoire reste sous contrôle militaire israélien.
- Perte d’informations : de
nombreux combattants détenant les données sur les lieux de détention ont
été tués.
- Contrôle
fragmenté : plusieurs factions palestiniennes étaient impliquées, rendant la
traçabilité complexe.
- Blocus
persistant : Israël interdit toujours l’entrée d’engins lourds et d’équipements
de levage.
« Ce sont leurs bombes qui ont détruit les lieux où étaient détenus leurs
propres captifs. Et maintenant, ils nous accusent de ne pas les retrouver. » Communiqué
du Hamas
L’absurde paradoxe moral
Tel Aviv menace de reprendre les frappes si les corps ne sont pas restitués
rapidement.
Mais comment exiger des équipes civiles, épuisées et privées de moyens, de
fouiller un champ de ruines créé par les bombardements israéliens eux-mêmes ?
C’est là tout le paradoxe moral de cette guerre : Israël demande à Gaza de
réparer ce que son armée a détruit.
L’oubli des morts palestiniens
Le Hamas a déjà restitué plus de dix des vingt-huit corps israéliens
prévus dans l’accord de cessez-le-feu. Les autres restent ensevelis.
Pendant ce temps, des centaines de corps palestiniens sont retrouvés
chaque jour sous les décombres.
Pourtant, cette tragédie ne suscite ni réunion d’urgence, ni négociation
internationale.
« La douleur d’une mère israélienne ne vaut ni plus ni moins que celle
d’une mère palestinienne mais seule la
première semble intéresser les caméras du monde. » Extrait d’un témoignage recueilli à Rafah
Conclusion :
l’hypocrisie du deuil sélectif
Accuser le Hamas de lenteur, c’est ignorer la géographie de la destruction.
Gaza n’est plus une ville : c’est un cimetière suspendu entre les ruines et le
silence.
Tant que perdurera le blocus, tant que les pelleteuses resteront bloquées aux
frontières, aucune restitution complète ne sera possible. Et le monde, lui,
continuera de choisir ses morts.
A/Kader
Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet « Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient
comme ça. » https://kadertahri.blogspot.com/
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