« La
nostalgie revient quand le présent n’est pas à la hauteur du passé. »
Ce texte est un cri du cœur, une lettre ouverte à ma
ville, Oran.
Une ville qui m’a vu grandir, rire, pleurer et rêver.
Entre nostalgie et espoir, je partage ici mes souvenirs d’une époque où la vie
avait le goût de la simplicité, et ma tristesse face à ce qu’elle est devenue.
Mais au fond de moi, je garde la certitude qu’Oran retrouvera un jour sa
lumière.
Les années d’insouciance
Oran… rien
que de prononcer son nom, mon cœur se serre et mes souvenirs affluent.
C’est ma ville, celle de ma jeunesse, de mes premières joies, de mes plus
grandes peines aussi. Là où j’ai appris à vivre, à aimer, à rire aux éclats, à
pleurer parfois. Oran, c’était plus qu’un lieu c’était une âme, un battement de
vie.
Dans le
quartier où j’ai grandi, tout le monde se connaissait. Les voisins étaient
comme une famille. On partageait le pain, les soucis et les moments de fête. On
se sentait en sécurité, entouré de regards bienveillants. Les gens étaient
simples, sincères, et surtout vrais.
On n’essayait pas d’impressionner, on vivait avec ce qu’on avait, fiers d’être
oranais.
Les familles
d’Oran portaient leur ville dans le cœur. Le civisme, le respect et l’éducation
étaient des valeurs sacrées. On apprenait très tôt ce que voulait dire la
propreté, le respect du bien commun. Malheur à celui qui salissait la rue il
recevait une bonne leçon de morale, et parfois plus !
C’était ça, l’esprit oranais : la fierté, la dignité, la simplicité et la
discipline mêlées à une joie de vivre unique.
Une époque
bénie
Quand on est
vrai et authentique, on n’a rien à cacher. À cette époque, les êtres naturels
fleurissaient dans leur environnement.
Oran vibrait d’une énergie pure : la liberté, la camaraderie, les plaisirs
simples. On riait sans raison, on profitait du coucher du soleil sur la mer, on
se retrouvait entre amis autour d’un café ou d’une partie de cartes.
Les rues
sentaient la menthe et la fleur d’oranger, les soirées d’été résonnaient de
musique et de bonne humeur.
Vivre, c’était simplement être là, ensemble.
Et moi, j’ai aimé la vie avec ses joies, ses excès, ses éclats de rire et ses
amitiés sincères.
On me disait
souvent :
« Ne cherche pas trop, les plus belles choses arrivent quand on ne les
attend pas. »
Et c’est vrai. La vie m’a appris à savourer chaque instant, à tirer des leçons
de mes erreurs sans m’y enfermer. Car certaines fautes, si on les rumine,
finissent par nous empêcher d’avancer.
Le
désenchantement
Mais aujourd’hui…
qu’en est-il ?
Je regarde ma ville et je ne la reconnais plus. On me dit qu’elle moderne, elle
n’avait pas besoin de changer, elle était déjà moderne.
Oran, jadis
perle du bassin méditerranéen, est devenue méconnaissable. Une grande partie de
ses habitants a perdu le sens du civisme, de la responsabilité et du respect.
Les rues sont jonchées d’ordures, les façades s’effritent, le patrimoine tombe
en ruine. Là où autrefois la vie bouillonnait, je ne vois plus que désordre et
abandon.
Ce qui me blesse
le plus, c’est cette indifférence générale.
Personne ne bouge le petit doigt, comme si tout cela était normal.
Notre ville, autrefois un rêve oranais, est devenu une ville morte — vidée de
son âme, trahie par ceux qui devaient la protéger.
Pendant des
décennies, Oran a été livrée à des élus incompétents, corrompus, plus soucieux
de leurs sièges que du bien commun. Ils ont détruit ce qui faisait la fierté
oranaise : la beauté, la culture, le respect et la convivialité.
Mais malgré tout, je veux croire que le changement est possible.
Un espoir,
encore
Oui,
j’espère encore.
J’espère voir émerger une nouvelle génération d’Oranais fiers, honnêtes et
responsables.
J’espère qu’ils sauront redonner à notre ville son éclat, son âme et son
honneur.
Nous, citoyens
d’Oran, devons bannir pour toujours cette mentalité du « takhti rassi
wetfout » — ce “tant que ça ne me concerne pas”.
Notre ville a besoin de vigilance, de civisme, d’amour.
Nous devons respecter nos rues, nos parcs, notre histoire, pour offrir un avenir
meilleur à nos enfants et petits-enfants.
La
transmission
Moi, je sais
que le temps m’est compté. Cela ne m’effraie pas.
Ce qui me préoccupe, c’est l’avenir de mes petits-enfants, ce monde dans lequel
ils grandissent — un monde dur, intolérant, où la curiosité s’éteint et où la
liberté se rétrécit.
Je voudrais
qu’un jour, eux aussi puissent dire :
« J’ai connu Oran, ma belle, ma fière, ma vivante. »
Qu’ils puissent rire sans crainte, aimer sans honte, rêver sans peur du
jugement.
Aurons-nous
su leur laisser ce droit ?
Je l’espère, de tout cœur.
Et pour
finir… Que Dieu
éclaire nos cœurs, qu’Il guide nos pas vers un avenir meilleur.
Qu’Il protège Oran, notre ville, notre fierté, notre mémoire collective.
Et qu’Il nous rappelle que rien n’est perdu tant qu’il reste un peu d’amour à
offrir.
Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient
comme ça. »
https://kadertahri.blogspot.com/

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire