Dans une
France rongée par ses fractures internes, les médias et les appareils d’État
ravivent l’obsession coloniale en désignant sans cesse l’Algérie comme le bouc
émissaire idéal. Derrière le « cambriolage du Louvre » et l’arrestation
express d’un suspect algérien, se cache un récit politique bien huilé : celui
d’un système médiatique français qui, au lieu d’informer, construit ses
ennemis.
Un récit trop parfait pour être vrai
La France volée, c’est étonnant, généralement on cite
ce pays pour des prix Nobel de donneurs
de Leçon, certes cette fois, il y a des affaires qui sentent la mise en scène
avant même d’avoir livré leurs preuves. Celle du « vol spectaculaire au
Louvre » en fait partie.
Deux suspects interpellés, dont l’un « sur le point d’embarquer pour Alger » —
un timing parfait, une histoire calibrée pour les plateaux télé, et une
conclusion servie avant l’enquête. En quelques jours, la machine médiatique
française s’est emballée, alignant les titres, les débats, les insinuations : “Algérie”,
“vol”, “fuite”, “Louvre”.
L’affaire aurait pu n’être qu’un fait divers ordinaire : deux suspects
interpellés, l’un d’eux sur le point d’embarquer pour Alger. Mais depuis, la
mécanique médiatique s’emballe. Tandis que certains désignent l’Algérie, c’est
ici que surgit l’interrogation : et si, dans le cadre de ces tractations, la
destination « Alger » avait été choisie non par hasard, mais pour *fabriquer
une apparence* ?
Une mise en scène destinée à jeter l’opprobre sur un pays déjà stigmatisé
dans le discours politico-médiatique français. Une hypothèse, certes, mais qui
mérite examen à l’heure où les narratifs s’entrechoquent et où la manipulation
de l’opinion devient un art d’État. Le cocktail rêvé pour alimenter
l’imaginaire colonial encore vivace dans une partie de la société française.
Comment ne
pas douter ?
Comment croire à une telle rapidité d’enquête, à des suspects “si maladroits”
qu’ils auraient laissé leurs traces ADN partout, avant de prendre l’avion ?
Ce scénario cousu de fil blanc semble taillé sur mesure pour une double
opération : fabriquer un coupable algérien et détourner l’attention des vrais
scandales qui éclaboussent les élites françaises, notamment au sein même du
musée du Louvre, gangrené depuis des années par des affaires de corruption et
de trafic d’antiquités.
Les médias français : usine à récits et manufacture de peur
Selon les informations du Monde, l’un des deux suspects est de
nationalité française, l’autre à la double nationalité franco-algérienne.
Cherchez l’erreur ? L’Algérie
devient encore une fois le décor commode d’un jeu de culpabilité. Pourtant ce
même média nous disait que Sansal était Français.
Ce qui se joue ici dépasse un simple fait divers. Depuis plusieurs années,
une frange importante des médias français a basculé dans une logique de
propagande identitaire.
Sous couvert de “faits d’actualité”, elle entretient un discours
racialisé où l’Arabe, l’Algérien, le musulman deviennent les symboles commodes
de l’insécurité et du désordre.
Chaque semaine, les chaînes d’info en continu recyclent le même schéma : un nom
à consonance maghrébine, une image floue, un bandeau alarmiste, et le poison de
la peur s’installe. Dès lors, deux récits s’affrontent.
Le premier, classique : un suspect lié à un vol, en fuite vers Alger, et la
tentation française de désigner l’Algérie.
Le second, plus dérangeant : **un scénario construit** pour rediriger le
soupçon, pour créer la confusion géopolitique et renforcer une image d’un
Maghreb trouble, perméable au crime.
Ce système
repose sur trois piliers :
- La simplification : réduire des réalités
complexes à des stéréotypes commodes.
- La répétition : marteler le même récit
jusqu’à le rendre “vrai” par saturation.
- La diversion : occuper le débat public avec
des polémiques périphériques pour éviter les vraies questions sociales et
politiques.
Résultat :
l’Algérie, son peuple, et ses ressortissants deviennent les boucs émissaires
d’une France qui refuse de regarder ses propres faillites. Ce racisme
médiatique, souvent maquillé sous le vernis du “débat républicain”,
n’est rien d’autre qu’une continuité coloniale.
Un racisme structurel hérité de l’Empire
L’affaire du
Louvre n’est qu’un symptôme. Elle révèle une pathologie plus ancienne : la
difficulté de la France à se décoloniser mentalement.
Sous la République, le regard colonial a simplement changé de costume. On ne
parle plus de “mission civilisatrice”, mais de “valeurs républicaines”.
On ne brandit plus le drapeau tricolore au Sahara, mais on impose un récit qui
hiérarchise encore les peuples et les cultures.
L’anti-algérianisme, lui, est devenu une
obsession d’État. Qu’il s’agisse des restrictions de visas, des insultes
diplomatiques, ou des campagnes médiatiques, tout concourt à entretenir un
rapport de mépris et de supériorité.
Et pendant que les plateaux télé accusent “les jeunes d’origine algérienne”,
personne ne s’interroge sur les causes profondes : exclusion, discriminations,
ghettos, mémoire falsifiée.
Le racisme
structurel français n’est pas une dérive ; il est un pilier du système.
Il alimente la peur pour justifier le contrôle, légitime la répression pour
masquer l’échec social, et maintient les citoyens dans un état de sidération
face à des “ennemis imaginaires”.
Les vrais voleurs sont en costume
Pendant
qu’on désigne un Algérien présumé voleur de tableaux, d’autres pillent la
culture mondiale depuis leurs bureaux dorés. Rappelons-le : Jean-Luc Martinez,
ex-directeur du Louvre, a été mis en examen pour trafic d’antiquités et
blanchiment en bande organisée.
Des œuvres égyptiennes, syriennes, libyennes ont été illégalement acquises sous
sa direction.
Mais qui en parle ?
Aucune émission, aucun grand titre ne lui colle l’étiquette de “criminel
culturel”.
Rien sur la
directrice et sa responsable de la sécurité ? Les manquements sont majeurs,
massifs, et elles sont toujours en poste. Quand va-t-on enfin en France donner
les postes pour une compétence et pas par idéologie ? Pour un sexe ou par
copinage ? Car c'est tout le pays qui s'effondre devant nous en ce moment.
Pourquoi ?
Parce que le pillage, quand il est européen, devient “commerce d’art”.
Parce que le vol, quand il est colonial, se transforme en “patrimoine
universel”.
Et parce que, dans la tête de certains, l’Algérien reste toujours celui qu’on
accuse, jamais celui qu’on écoute.
Le vol le plus grave : celui de la vérité
L’affaire du
Louvre n’est pas un simple fait divers : c’est un miroir.
Un miroir tendu à une France qui se croit toujours au-dessus du monde, mais qui
sombre dans la manipulation et le mensonge.
Un miroir qui révèle la stratégie d’un pouvoir politique et médiatique en quête
de boucs émissaires pour masquer sa propre décadence morale.
À force de
travestir les faits, de criminaliser des peuples entiers, et de rejouer les
vieux réflexes coloniaux, la France moderne perd ce qu’elle prétend défendre :
la liberté, l’égalité et la vérité. Pauvre petit pays, déclassé, et qui
se croit encore le phare du monde, merci pour la leçon, puissions-nous en tirer
les conséquences !
Alors oui,
il faut le dire haut et fort : le plus grand vol, ce n’est pas celui d’un
tableau du Louvre, mais celui de la vérité — volée par les médias, maquillée
par la politique, et enterrée sous les mensonges d’un empire qui ne se remet
toujours pas de sa chute.
A/Kader Tahri
/ Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient
comme ça. » https://kadertahri.blogspot.com/
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