On avait promis que la guerre s’arrêterait une fois
les otages israéliens libérés. Mais les bombardements se poursuivent, les
civils meurent, et le langage de la paix a été remplacé par celui de la
punition.
Cette tribune dénonce la logique d’une guerre devenue autonome, sans
justification ni frein moral, où la mort des innocents sert désormais
d’argument politique
On nous
avait juré que la guerre s’arrêterait lorsque les otages reviendraient.
C’était le refrain, répété sur toutes les chaînes, dans toutes les
chancelleries, sur toutes les lèvres des partisans d’Israël : « Libérez les
otages, et la paix reviendra. »
Ce slogan, brandi comme une vérité morale, servait à justifier l’injustifiable
: les bombardements de quartiers entiers, les enfants sortis sans vie des
ruines, les hôpitaux frappés, les familles décimées.
Mais aujourd’hui, les otages sont libres. Et les massacres, eux, ne se sont pas
arrêtés.
Le mensonge de la condition
Ce qu’on
appelle « conditions à la paix » n’était qu’une façade. Une justification
rhétorique pour masquer un projet bien plus profond : celui d’écraser un peuple
jusqu’à l’effacement.
Le discours humanitaire n’a été qu’un déguisement. Derrière les appels à la
libération des captifs, il n’y avait pas la compassion il y avait la stratégie.
On n’attendait pas que le Hamas cède pour cesser de frapper Gaza ; on frappait
Gaza pour anéantir tout ce qui, de près ou de loin, pouvait ressembler à une
résistance, à une existence autonome, à une dignité palestinienne.
Lorsque
l’armée israélienne a fait exploser, vendredi, un véhicule transportant une
famille palestinienne de onze personnes dont sept enfants, elle a invoqué la même
justification qu’à chaque fois : une « violation de zone ».
Un mot technique, sec, bureaucratique, pour décrire une exécution.
On a tué des enfants parce qu’ils avaient franchi une ligne invisible sur une
carte militaire.
Et dans les communiqués officiels, cette absurdité devient doctrine.
Tout comme il y a un an, les massacres étaient justifiés au nom des « otages ».
L’argument s’est effondré la violence demeure
Aujourd’hui
ils ont lancé des frappes à Rafah pour venir en aide à leurs groupés armées qui
ont reçu l’ordre de violer le cessez le feu pour accuser la Résistance. Des images satellites récentes révèlent la
présence d’une base de l’armée d’occupation israélienne (Tsahal) ainsi que
d’une milice composée de gangsters armés (en jaune sur la carte) à la solde
d’Israël, dans le quartier de Shuja’iyya, à l’est de la ville de Gaza.
Placée sous
le commandement de Rami Khalas, cette milice, formée d’éléments de type
mafieux, dispose d’une base attenante à celle de Tsahal. Elle est armée,
encadrée et supervisée par Israël, dans le cadre de ses opérations contre le
mouvement Hamas.
Par ailleurs, une activité intense et inhabituelle a été observée hier aux coordonnées 31.4977, 34.4742, laissant apparaître une expansion des infrastructures et un trafic accru de véhicules lourds à proximité de la principale base de l’armée d’occupation dans ce secteur.
Ceux qui
suivaient cette guerre depuis longtemps n’en sont pas surpris. Ils savaient
déjà que le sort des otages n’était pas la cause, mais le prétexte.
L’armée israélienne n’a jamais bombardé Gaza pour sauver des vies israéliennes
: elle a bombardé Gaza pour punir des vies palestiniennes.
Les faits le prouvent, inlassablement.
Quand des hôpitaux ont été visés, on a invoqué la présence supposée du Hamas
dans leurs sous-sols.
Mais des médecins occidentaux, présents sur place, ont raconté une autre
histoire : celle de soldats entrant dans les hôpitaux détruits pour saccager
les appareils restants, méthodiquement, pièce par pièce, pour que plus aucun
hôpital ne puisse fonctionner.
Ce n’était pas une guerre contre le Hamas.
C’était une guerre contre la survie elle-même.
Aujourd’hui,
le récit officiel se fissure encore.
Les otages ont été libérés — et pourtant, les bombes ne se sont pas tues.
Les arguments s’effondrent les uns après les autres, mais la machine, elle,
continue de tourner.
Parce que la guerre, à ce stade, n’a plus besoin de justification : elle
s’autoalimente.
Elle est devenue sa propre raison d’être.
Le vacarme des tambours
Écoutez les
discours des dirigeants israéliens : ils battent les tambours de la guerre au
nom de la sécurité, de la défense, de la survie.
Mais quelle sécurité naît du sang de milliers d’enfants ?
Quelle survie se fonde sur l’anéantissement méthodique d’un peuple enfermé dans
un territoire déjà asphyxié ?
Le langage militaire a dévoré le langage moral.
On ne parle plus d’humains, mais de « zones », de « cibles », de « frappes
préventives ».
La guerre est devenue un processus administratif, réglé, presque automatique,
où la mort de civils n’est plus une tragédie mais une statistique.
Et pourtant,
derrière chaque chiffre, il y a un visage, un nom, une voix qui ne parlera
plus.
Des enfants qui ne verront jamais la lumière du matin.
Des parents qui ne peuvent plus enterrer leurs morts parce que les bulldozers
sont interdits d’entrée.
C’est cela, la réalité de Gaza un lieu où même les funérailles sont un luxe.
Le piège moral de l’Occident
Ce silence
complice, ce confort moral, pèsent aussi sur nous.
Nous avons laissé s’installer un discours où l’indignation dépend de l’identité
des morts.
Où certains corps méritent les pleurs des chancelleries, et d’autres seulement
des notes diplomatiques.
L’Occident, si prompt à brandir les droits humains ailleurs, se tait lorsque
son allié commet l’irréparable.
Ce silence est devenu une politique en soi une manière de se protéger de la
honte.
Mais
l’histoire jugera ce silence avec la même sévérité qu’elle a jugé d’autres
silences, dans d’autres temps.
Car ceux qui prétendaient que « tout cesserait une fois les otages libérés
» savaient, au fond, que rien ne cesserait. Ils savaient que la guerre n’était
pas un moyen, mais un but. Et que la paix, dans leur bouche, n’était qu’un mot
vidé de sens.
Le cri sous les ruines
À Gaza, il
ne reste presque rien : ni hôpitaux, ni routes, ni abris, ni illusions.
Mais il reste la voix des vivants ceux
qui fouillent les décombres à mains nues, ceux qui refusent que la mort
devienne normale, ceux qui persistent à nommer les disparus un à un.
Cette voix, étouffée par le vacarme des bombardements, continue de dire ce que
le monde refuse d’entendre : que tuer des civils n’est pas une erreur de
guerre, mais une stratégie.
Et que la pire barbarie n’est pas celle des armes, mais celle du mensonge.
Épilogue : le jour d’après
Ils avaient
promis que tout s’arrêterait. Que la paix viendrait, que les enfants
cesseraient de mourir, que les otages étaient la clé du drame.
Mais aujourd’hui, alors que les bombes poursuivent leur œuvre, la vérité
s’impose : ce n’était pas une guerre pour sauver des vies, mais pour en
détruire.
Et tant que ce mensonge continuera d’être répété, tant que la mort sera
présentée comme un acte de défense, tant que le monde fermera les yeux sur la douleur
des plus faibles, alors les tambours de guerre ne cesseront jamais de battre.
Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet « Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient
comme ça. » https://kadertahri.blogspot.com/
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