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Palestine : quand l’accusation d’islamisme masque la réalité de l’occupation

 


Une certaine presse de courant sioniste, nous met en présentoir un texte qui propose de relire la question palestinienne à travers le prisme de Sayyid Qutb et de l’héritage des Frères musulmans. Il décrit la solidarité internationale avec la Palestine comme une manipulation idéologique, destinée à "frapper l’Occident dans sa culpabilité" et à ériger la cause palestinienne en "mythe fondateur d’une régénération islamique". Un tel cadrage appelle une lecture critique, tant il repose sur des amalgames et des glissements qui occultent la réalité première du conflit : la colonisation et l’occupation.

Un tel discours d’une obsession tenace pour expliquer la cause palestinienne non pas comme une lutte contre la colonisation et l’occupation, mais comme une manipulation idéologique héritée des Frères musulmans et de Sayyid Qutb. Ce type de récit détourne le regard de l’essentiel : les Palestiniens ne se battent pas pour "dissoudre l’Occident", ils se battent pour vivre libres sur leur terre.

L’amalgame permanent : Palestiniens = Hamas = Qutb

Le texte en question établit une chaîne trompeuse : Qutb → Frères musulmans → Hamas → tous les Palestiniens → les soutiens occidentaux. Résultat : la diversité du mouvement national palestinien disparaît. Or, faut-il rappeler que l’OLP, le Fatah ou encore une partie importante de la gauche palestinienne sont des organisations laïques, dont le combat est d’abord national et politique ? Assimiler toute la Palestine à l’héritage de Qutb, c’est nier cette pluralité et réduire un peuple entier à une idéologie qui n’est pas la sienne.

La "culpabilité occidentale" comme explication unique

Selon ce récit, si des universités, des ONG ou des responsables politiques soutiennent la Palestine, ce n’est pas par souci de justice, mais par obsession de se laver des fautes coloniales et de la Shoah. Mais qui peut sérieusement prétendre que les critiques contre l’occupation, les colonies illégales ou le blocus de Gaza ne reposent que sur une "culpabilité morale" ? La solidarité avec la Palestine s’appuie sur des faits : confiscation des terres, expulsions forcées, apartheid reconnu par plusieurs organisations de défense des droits humains.

Nul besoin d’invoquer Qutb pour comprendre pourquoi cette situation indigne.

 

 

 

Edward Saïd instrumentalisé

Pour donner du poids à son récit, l’auteur convoque Edward Saïd. Mais c’est une récupération grossière. Saïd n’était ni islamiste, ni proche des Frères musulmans : il était un intellectuel laïc, critique autant de l’orientalisme que de l’islamisme. L’associer à Qutb, c’est déformer son œuvre et trahir son héritage.

Le vrai glissement : de la colonisation à la guerre des civilisations

Ce type de discours transforme un conflit territorial en affrontement civilisationnel. Les Palestiniens n’apparaissent plus comme un peuple colonisé qui réclame ses droits, mais comme des pions d’une guerre idéologique contre l’Occident. Et ainsi, au lieu de parler du mur, des checkpoints, des démolitions de maisons, on parle de "stratégie de dissolution morale". C’est une manière commode d’effacer la réalité concrète de l’occupation.

En réalité…

Dépeindre la cause palestinienne comme "application de la méthode Qutb" revient à effacer la réalité du terrain : celle d’un peuple sous occupation, réclamant non pas la régénération de l’islam mais la reconnaissance de ses droits fondamentaux.

Ce qui se joue en Palestine n’est pas un "complot islamiste mondial" mais bien une lutte contre un système colonial. Oui, le Hamas existe, et il se réclame d’une idéologie islamiste. Mais réduire la cause palestinienne à ce seul prisme, c’est commettre une double injustice : d’abord à l’égard des Palestiniens eux-mêmes, dont la lutte dépasse de loin le Hamas, et ensuite à l’égard de ceux qui, dans le monde, les soutiennent par conviction de justice, non par culpabilité.


En conclusion

Il est temps de dire clairement les choses : brandir Qutb et les Frères musulmans comme clé d’explication de la cause palestinienne, c’est une diversion. Cela permet d’éviter le sujet central : la colonisation, l’occupation et les droits fondamentaux d’un peuple. Derrière les grandes théories civilisationnelles, ce sont toujours les Palestiniens qui paient le prix, parce qu’on refuse de voir leur combat pour ce qu’il est : un combat pour la liberté.

Kader Tahri
Chroniqueur engagé, observateur inquiet
« Il faut dire les choses comme elles sont, mais refuser qu’elles soient comme ça. »

https://kadertahri.blogspot.com/


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