Parfois, il m'est utile de le dire ?

  L'idée de ce travail est née de la lecture des échanges sur des forums, lors de dialogues entre musulmans et chrétiens. Ces échanges s...

Israël/Gaza : Manipulation mémorielle

 


Le débat sur Gaza s’enfonce dans une bataille de mots :                                                                       Peut-on nier le génocideque subit la population de Gaza?                                                                   Peut-on signaler un  Israël, sioniste, colonialiste, dominant à la haine brute ?                                     Faut-il s’en tenir au terme de crimes de guerre ou crimes contre l’humanité?                                          Il suffit de dire  le sionisme est un apartheid ?                                                        

Une récente tribune relayée dans plusieurs médias tente de dénoncer l’instrumentalisation du terme “génocide” contre Israël et de défendre la pureté du concept à travers le prisme mémoriel de la Shoah. Israël et ses alliées médiatiques se battent religieusement contre le terme de «génocide» dont l’unique signification reste la destruction méthodique d'un groupe humain, ainsi aujourd’hui les récents massacres perpétrées depuis Octobre 2023 contre la population de Gaza, présentent parfaitement le caractère génocidaire des actes progressifs qui avaient permis à l’armée sioniste et ses stratèges de guerre d’anéantir plus de 100.000 Palestiniens (une évaluation approximative)

Ce raisonnement, apparemment rigoureux sur le plan juridique, s’avère en réalité profondément biaisé, partial et déshumanisant. Pire, il balaie d’un revers de main les dizaines de milliers de morts civils, les destructions massives, les disparitions d’hôpitaux, d’écoles, de logements, et les famines annoncées dans l’enclave la plus densément peuplée du monde.

Israël et la presse occidentale ont préféré simplifier plutôt qu’informer, surtout à faire douter de la culpabilité d’Israël avérée par le son et l’image avec une  intention sciemment de tout détruire et les discours haineux de nombreux responsables israéliens, qui assimilent toute la population gazaouie à une “menace existentielle” et “des animaux humains”, justifiant ainsi les représailles les plus extrêmes

Sous prétexte que Gaza ne serait pas Auschwitz et que la Shoah serait unique, avec l’ absurdité de vouloir réconcilier les mémoires des oppresseurs et des opprimés, des colonisateurs et des colonisés, des bourreaux et des victimes, on refuse même d’interroger la nature des exactions commises à Gaza. On transforme une crise humanitaire majeure en simple “dommage collatéral” d’une “guerre imposée à Israël”, alors que le droit international impose des limites strictes, même en cas de conflit armé, juste pour défendre la dénonciation d’un supposé “privilège victimaire des Juifs” qu’il faudrait préserver. Cet angle est une tentative grossière de disqualification morale : toute critique d’Israël serait suspecte, car elle viserait à rabaisser la mémoire juive.

Ce chantage émotionnel est non seulement malhonnête mais surtout toxique pour la mémoire universelle. Reconnaître la Shoah comme un crime unique dans son ampleur n’interdit en rien de nommer d’autres crimes pour ce qu’ils sont. Les Palestiniens n’ont pas à payer le prix historique de la Shoah. Leur souffrance mérite respect et justice, sans être systématiquement comparée, minimisée ou instrumentalisée.

Le génocide des Gaza se traduit également le point essentiel : l’intention génocidaire peut se déduire des actes et des effets matériels. La destruction systématique des infrastructures vitales, la privation délibérée de nourriture, d’eau, d’électricité, et les déplacements forcés correspondent très concrètement aux critères établis par les tribunaux internationaux.

Gaza nous offre l’image flagrant d’une destruction à grande échelle  des bâtiments sur plusieurs zones de Gaza donne une impression que de vie disparue et on comprend l’impression que  à Gaza «tout a été détruit dans une intention génocidaire».

Plusieurs spécialistes en droit international, y compris des Israéliens comme Omer Bartov, estiment que des éléments matériels et déclarations politiques remplissent ces critères à Gaza. Le génocide peut se déduire non seulement des actes mais aussi de la politique systématique de destruction, des discours déshumanisants de hauts responsables et de la brutalité disproportionnée sur une population civile enfermée.

A Gaza, Omer Bartov parle des infrastructures détruites, des pénuries alimentaires, des déplacements forcés et des discours de certains dirigeants israéliens assimilant la population tout entière à des ennemis absolus et il conclut que les critères juridiques de génocide sont présents et qu’il faut tirer la sonnette d’alarme. Autrement dit, il alerte sur Gaza pour éviter Buczac

Le droit international interdit les massacres systématiques, même en deçà du “génocide total”. Des milliers de morts civiles, des quartiers rasés, une population affamée et déplacée constituent un crime gravissime, indépendamment de l’échelle.

Surtout, cette stratégie rhétorique revient à relativiser la souffrance palestinienne sous prétexte qu’ils sont des terroristes. Or, chaque mort civile, chaque enfant privé d’eau ou de soins, est une tragédie qui mérite qu’on s’y attarde sans faire de hiérarchie choquante.

En fait, aucune législation internationale ne permit à Etat colonisateur, fort de sa souveraineté  de massacrer une partie de la population colonisée. Cependant Israël avait toujours évite soigneusement toute référence aux causes structurelles du conflit : occupation militaire, colonisation des terres palestiniennes, blocus total de Gaza depuis près de deux décennies, apartheid reconnu par de nombreuses ONG internationales.

On nous parle d’une guerre “imposée”, mais on tait les décennies d’oppression, de spoliation et de violation du droit international. On transforme un peuple colonisé en agresseur, Israël en simple “État assiégé” alors qu’il dispose de l’une des armées les plus puissantes au monde.

Israël mène une guerre dans une action  que certains ont qualifiée de génocidaire, celle de la destruction totale de Gaza, dans la mesure où elle visait à soumettre cette population à des conditions de vie menant à sa destruction. Réduire Gaza à un simple champ de bataille après le 7 octobre, sans analyser la colonisation et les souffrances prolongées, constitue une forme de négation politique. Israël dissimule totalement les causes profondes du conflit, notamment l’occupation militaire, le blocus, les colonies illégales et le traitement d'apartheid dénoncé par plusieurs ONG.

Donc même en guerre, le massacre de milliers de civils, y compris femmes et enfants, la destruction massive d’hôpitaux et d’infrastructures vitales relèvent d’un crime international, que ce soit génocide ou crime contre l’humanité.

 

Assimiler Gaza à Auschwitz serait démesuré, mais refuser d’employer tout terme de génocide au prétexte qu’il y a eu pire revient à relativiser la gravité extrême de la situation à Gaza. Les souffrances des populations civiles sont universelles. Si Gaza est autant médiatisé, c’est parce que la communauté internationale finance Israël, le protège diplomatiquement, et reste complice de fait.

Cependant et malgré les équivoques médiatique occidentaux et israéliennes, le reste du monde a le devoir d’expliquer les manipulations mémorielles en jeu à ceux qui veulent soustraire  l’acte d’Israël dans le  génocide à Gaza. Revendiquer justice pour les Palestiniens n’enlève rien à la mémoire de la Shoah. On peut dénoncer deux tragédies sans opposer les victimes.

Dénoncer que les souffrances à Gaza ne sont ni exagérées ni manipulées, mais souvent sous-estimées. Il est légitime de parler de crime de masse, voire de génocide conditionnel, et surtout de crime contre l’humanité, sans tomber dans des polémiques mémorielles. Citer la mémoire de la Shoah ne doit pas servir de prétexte pour excuser l’injustice contre un autre peuple.

Il faut dénoncer sans ambiguïté toute instrumentalisation politique de la mémoire. Oui, la Shoah est un événement unique, mais le génocide de Gaza est plus féroce, il y a un plaisir de tuer, cela ne donne à aucun État, fût-il Israël, le droit de massacrer en toute impunité.

Oui, il y a des amalgames dangereux, mais le véritable danger est de laisser croire que certaines vies humaines valent moins que d’autres, que certaines souffrances sont moins légitimes parce qu’elles viennent des “mauvais” peuples. Face aux crimes perpétrés à Gaza, il est urgent de sortir de ce déni collectif. Il est urgent de dénoncer les faits, d’exiger la justice, et de ne pas laisser les manipulations mémorielles étouffer la voix des opprimés.

Le droit international interdit les destructions massives intentionnelles, même à échelle moindre que la Shoah. Un crime reste un crime, indépendamment de l’histoire du monde. Mais ce qui se passe à Gaza aujourd’hui  est peut-être pire Auschwitz,   cela ressemble dangereusement à un crime collectif qui laissera une trace indélébile dans l’histoire contemporaine.

Gaza est l’exemple parfait du cynisme contemporain un territoire occupé au mépris du droit, un peuple effacé au nom des intérêts, et un conflit que ni l’ONU, ni l’Occident, ni les États-Unis, ni les monarchies du Golfe ne veulent voir résolu. Israël colonise et annexe à son bon vouloir, massacre la population autochtone, les Etat Unis et ses alliés soutiennent l’oppression, les pétromonarchies regardent et  applaudissent. Pendant ce temps, les Palestiniens restent les oubliés officiels du nouvel ordre régional. La realpolitik a ses préférés. Le droit garde ses orphelins.

Gaza est au cœur de l’actualité, c’est précisément parce que le monde musulman a  collectivement les moyens d’arrêter le massacre, contrairement à d’autres zones de conflit oubliées. L’hypocrisie ne consiste pas à dénoncer Gaza, mais à fermer les yeux sous prétexte qu’il y aurait pire ailleurs.

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